CDD : quel est le formalisme de la promesse d'embauche?

Publié le 14/09/2016

Une promesse d’embauche, même verbale, vaut contrat de travail. Néanmoins, dans l’hypothèse d’une embauche en CDD, on peut se demander si elle doit présenter le même formalisme. C’est sur ce point que s’est récemment prononcée la Cour de cassation : une promesse d’embauche en CDD n’a pas à comporter les mentions obligatoires du CDD. Cass. Soc. 06.07.16, n° 15-11138.

  •  Les faits

 Une salariée est embauchée par une société, d’abord en CDD, en vue de remplacer une sténodactylo en congé maternité (du 2 décembre 1991 au 25 février 1992) puis, en CDI, en qualité de secrétaire commerciale standardiste. En novembre 2011, la société engage une procédure de licenciement économique au terme de laquelle la salariée se voit notifier son licenciement par lettre recommandée le 12 décembre 2011.

 C’est dans ce contexte que la salariée saisit la juridiction prud’homale afin d'obtenir, entre autres, le paiement d’une indemnité de requalification de son CDD et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 La cour d’appel donne raison à la salariée : elle relève en effet l’existence d’une promesse d’embauche en CDD datée du 31 octobre 1991. La promesse confirmait bien les conditions d’embauche de la salariée. En revanche, elle ne précisait pas la qualification de la personne remplacée. Ne comportant donc pas toutes les mentions obligatoires propres aux CDD, la cour d’appel a accepté la requalification du CDD en CDI et le versement des indemnités qui en découlent.

La Cour de cassation ne va toutefois pas dans ce sens. Elle considère au contraire que le formalisme exigé pour les CDD ne s’impose pas lors de la rédaction d’une promesse d’embauche en CDD. Il n’y a donc pas lieu de demander (et d’obtenir) la requalification du contrat en CDI.

  • La promesse d’embauche vaut contrat de travail...

Pour rappel, une promesse d’embauche est l’engagement de l’employeur au recrutement d’un candidat à une offre d’emploi.
Pour être considérée comme telle, la promesse doit être ferme, adressée à une personne désignée, préciser l’emploi proposé ainsi que la date d’entrée en fonction et, éventuellement, la rémunération et le lieu de travail (1). A défaut, c’est une simple offre d’emploi qui n’engage pas l’employeur en cas de rétractation.

 Qu’elle soit écrite ou verbale, une promesse d’embauche vaut contrat de travail (et ce, même si son exécution n'a pas débuté) et sa rupture injustifiée par l’employeur constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Attention, car une promesse signée par le salarié engage également celui-ci ! Il serait en effet susceptible d'avoir à verser des dommages-intérêts à l'employeur dans l'hypothèse où il romprait la promesse de manière injustifiée.

En l’espèce, la cour d’appel constate l’existence d’une promesse d’embauche et reconnaît que celle-ci, confirmant bien les conditions d’embauche de la salariée, vaut contrat de travail. 

Mais les juges du fond vont plus loin. En effet, la promesse valant contrat, ils vont tout logiquement lui appliquer les obligations légales relatives à la rédaction d’un CDD. 

Contrairement au CDI, un CDD doit obligatoirement être établi par écrit et comporter des mentions obligatoires telles que la définition précise de son motif, le nom et la qualification professionnelle de la personne remplacée en cas de remplacement, la date du terme du contrat, etc.
Le Code du travail ajoute que le défaut de précision du motif de recours entraîne la requalification du CDD en CDI. Pour la jurisprudence, cette requalification vaut en l’absence de toute mention essentielle.

Le raisonnement de la cour d’appel est simple : la promesse d’embauche remplit effectivement les conditions de forme nécessaires à la qualification de contrat de travail. Or, s’agissant ici d’un CDD, elle aurait dû en outre comporter l’ensemble des mentions obligatoires listées à l’article L. 1242-12 du Code du travail et caractérisant les contrats à durée déterminée. 

Il se trouve qu'ici la promesse d’embauche ne précisait pas la qualification professionnelle de la personne remplacée. Cette mention étant essentielle et obligatoire pour un CDD de remplacement, son absence entraîne la requalification du CDD en CDI. La cour d'appel considère en effet que le document signé ensuite le premier jour d'exécution du contrat (et qui comportait bien la mention obligatoire), n'était qu'une régularisation tardive inopposable au salarié. 

  • ... mais échappe à son formalisme

La question posée à la Cour de cassation était donc la suivante : peut-on exiger d’une promesse d’embauche en CDD qu’elle respecte le formalisme propre aux CDD ?

Non, selon la Cour de cassation, « les dispositions de l’article L. 1242-12 du Code du travail ne s’appliquent pas à une promesse d’embauche ». Ce formalisme ne s’impose en effet qu’au moment de la rédaction du contrat de travail à durée déterminée. La promesse n'a donc pas à comporter tous les éléments du contrat de travail, ces mentions pouvant être précisées et complétées ultérieurement dans un contrat de travail écrit. En l'espèce, le document signé ensuite par les deux parties, le 2 décembre 1991, comportait bien la qualification de la personne remplacée, il n'y avait donc pas lieu de requalifier le CDD.

Autrement dit, ce n’est pas parce qu’une promesse d’embauche a la même valeur juridique qu’un contrat de travail qu’elle doit en revêtir les mêmes formes. 


Si l’application de cette règle ne pose pas de difficultés particulières pour un CDI, elle trouve en revanche toute sa portée dans le cadre d’un CDD dont la qualification même dépend de la présence ou non de ces mentions
Si une promesse d’embauche en CDD régulière vaut contrat de travail, la nature de ce contrat dépendra donc éventuellement de la façon dont il sera (ou non) finalement rédigé.


(1) Cass. soc. 15.12.10, n° 08-42951.