Permanents syndicaux : attention à l’accident!
Le Code de la sécurité sociale considère qu’un accident du travail survient par le fait ou à l’occasion du travail. C’est donc par application stricte de cet article que la Cour de cassation vient de rappeler que l’accident d’un permanent syndical survenu au cours de ce détachement ne peut bénéficier de la législation protectrice du travail (Cass. civ 2, 18.09.14, n° 13-14435).

- Rappel des faits
Dans cette affaire, un militant CFDT, délégué syndical dans son entreprise, bénéficie d’une décharge partielle d’activité pour exercer les fonctions de secrétaire adjoint de son syndicat. Il est victime d’un accident de la circulation, alors qu’il est de retour d’un colloque.
Une déclaration d’accident du travail est établie, mais la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) refuse de prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle. Il décide alors de saisir les tribunaux.
La question posée aux juges du fond était de savoir si l’accident du syndicaliste est survenu alors qu’il intervenait au colloque en sa qualité de délégué syndical (représentant du personnel de l’entreprise), ou bien en sa qualité de permanent syndical (détaché auprès de son syndicat) ?
- Une question de taille au regard des conséquences engendrées :
- S’il intervenait en qualité de délégué syndical, alors il aurait pu démontrer l’existence d’un lien immédiat entre ce colloque et son mandat, et ainsi bénéficier de la législation professionnelle.
- À l’inverse, s’il intervenait dans le cadre de son détachement, en sa qualité de secrétaire adjoint de syndicat, il n’aurait pu bénéficier de la législation sur les accidents du travail.
La Cour d’appel, appréciant souverainement les éléments de fait fournis par les parties, a estimé que le thème du colloque (la lutte et la prévention de la maltraitance) est sans lien avec son mandat et qu’il s’y est rendu en sa qualité de secrétaire de syndicat, et non de délégué syndical. L’accident n’est donc survenu par le fait ou à l’occasion du travail et ne peut donc bénéficier de la législation professionnelle, faisant en cela une application stricte de l’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale.
Une décision confirmée par la Haute Cour qui rappelle dans son attendu de principe le pouvoir souverain des juges du fond : « Mais attendu qu’il appartient aux juges du fond de rechercher si un accident est survenu par le fait ou à l’occasion du travail ». Elle sous-entend que cet accident, dans le cadre du détachement syndical, n’est pas survenu par le fait ou à l’occasion du travail et ne peut donc bénéficier de la législation professionnelle.
- Quelles conséquences pour les militants ?
Cet arrêt, dont la solution peut avoir de lourdes conséquences pour les militants syndicaux en détachement, est donc l’occasion de revenir sur la couverture dont ils bénéficient en cas d'accident, en fonction du contexte dans lequel il intervient : dans ou hors de l’entreprise.
- Dans l’entreprise, le bénéfice par principe de la législation professionnelle
L’accident qui survient à un représentant du personnel, au temps et au lieu de travail (pendant des heures de délégation ou lors d’une réunion organisée par l’employeur) ne pose pas de difficulté particulière et est, par principe, qualifié d’accident du travail.
- Hors de l’entreprise, la reconnaissance de l’accident du travail est plus compliquée voire impossible
Si l’accident survient au cours d’un déplacement d’un représentant du personnel (DP, élu CE, DS) hors de l’entreprise, la jurisprudence admet la qualification d’accident du travail uniquement lorsque le représentant du personnel ou le délégué syndical parvient à démontrer que le déplacement est en lien immédiat avec le mandat dont il est investi.
L’accident qui survient pendant des heures de délégation n’est donc pas systématiquement qualifié d’accident du travail. Il faudra se poser la question du lieu de l’accident, et du lien entre l’activité exercée au moment de l’accident et le mandat du militant.
Dans le cas des permanents syndicaux, qui cessent temporairement leur activité professionnelle pour se mettre au service de leur organisation syndicale, ces derniers ne peuvent bénéficier de la législation professionnelle en cas d’accident. Leur contrat de travail étant suspendu, il ne peut donc pas y avoir d’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail.
À défaut de pouvoir bénéficier d’une prise en charge au titre des accidents du travail, le militant CFDT, victime d’un accident pendant son activité syndicale, en dehors de l’entreprise, pourra se rapprocher de la CNAS afin de savoir s'il remplit les conditions pour bénéficier de l’assurance « vie syndicale » souscrite par celle-ci.