Cass.soc.23.10.24, n°23-11.087
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Les syndicats ont la possibilité d’agir à la place et pour le compte des salariés dans des actions dites en substitution. Ces actions sont cependant limitées à des situations précises et doivent respecter un formalisme particulier. La Chambre sociale de la Cour de cassation est venue préciser dans un arrêt du 23 octobre 2024 les formalités substantielles d’une telle action, ainsi que la sanction en cas de manquement à ces règles. Cass.soc.23.10.24, n°23-11.087
Un syndicat intervenant dans le champ de l'intérim a saisi le conseil des prud’hommes pour les intérêts de 215 salariés de la société Manpower France. L'objectif principal était d'obtenir la condamnation de la société à verser à chaque salarié la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat mise en place dans l'entreprise utilisatrice au sein de laquelle ils travaillaient en décembre 2018.
Le conseil de prud’hommes a déclaré les actions en substitution du syndicat irrecevables en ce que l’information donnée aux salariés de l'action engagée en leur faveur est intervenue postérieurement à l'introduction de l'instance.
L’article L.1251-59 du Code du travail énonce que « Les organisations syndicales représentatives peuvent exercer en justice toutes les actions résultant de l'application du présent chapitre en faveur d'un salarié sans avoir à justifier d'un mandat de l'intéressé. ».
Les syndicats peuvent donc agir à la place des salariés et ceci sans mandat pour ce qui concerne précisément les travailleurs ayant conclu un contrat de travail avec une entreprise de travail temporaire.
L’article poursuit : « Le salarié est averti dans des conditions déterminées par voie réglementaire et ne doit pas s'y être opposé dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle l'organisation syndicale lui a notifié son intention.
Le salarié peut toujours intervenir à l'instance engagée par le syndicat et y mettre un terme à tout moment. »
Cette partie de l’article énumère les conditions dites substantielles pour que le syndicat puisse agir à la place et pour le compte d’un travailleur, sans que celui-ci lui ait donné mandat.
L’article D.1251-32 du Code du travail énonce plus précisément le contenu obligatoire de l’avertissement adressé au salarié par le syndicat : « L'organisation syndicale qui exerce une action en justice en faveur d'un salarié, en application du deuxième alinéa de l'article L. 1251-59, avertit ce dernier par lettre recommandée avec avis de réception.
La lettre indique la nature et l'objet de l'action envisagée par l'organisation syndicale représentative.
Elle mentionne en outre :
1° Que l'action est conduite par l'organisation syndicale qui peut exercer elle-même les voies de recours contre le jugement ;
2° Que le salarié peut, à tout moment, intervenir dans l'instance engagée par l'organisation syndicale ou mettre un terme à cette action ;
3° Que le salarié peut faire connaître à l'organisation syndicale son opposition à l'action envisagée dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception. »
C’est justement sur ces conditions substantielles et leur non-respect que la Cour de cassation se positionne dans l’arrêt étudié.
La combinaison des articles L.1251-59 et D.1251-32 du Code du travail oblige donc le syndicat à avertir le salarié de l’action en substitution, ainsi que du droit à un délai de 15 jours pour s’opposer à cette action.
Ces articles ne précisent cependant pas à quel moment cette information doit intervenir vis-à-vis notamment de l’introduction de l’instance.
Le syndicat et les salariés ont soutenu devant la Cour de cassation que l’envoi de cet avertissement devait être effectué au moins quinze jours avant le prononcé du jugement.
La Cour de cassation ne suit pas le raisonnement du syndicat et rejette les pourvois.
Elle valide les jugements qui ont constaté que les documents produits démontraient que le syndicat avait informé les salariés de l'action engagée en leur faveur postérieurement à l'introduction de l'instance. Le conseil de prud'hommes en avait exactement déduit que les actions de substitution du syndicat étaient irrecevables.
Ainsi l’avertissement de l’action en substitution pour le compte d’un salarié doit être effectué au plus tard le jour de l’introduction de l’instance.
La Cour de cassation a également précisé que les informations de l’article D.1251-32 doivent impérativement figurer au sein de la lettre d’avertissement du salarié. Si ce point précis n’était pas le sujet du litige, il est probable que la sanction en cas d’absence d’une de ces mentions serait également l’irrecevabilité de l’avertissement si la situation n’est pas régularisée avant l’introduction de l’instance.