La Garantie jeunes fête ses cinq ans d’existence avec un bilan prometteur
Le dispositif d’insertion professionnelle destiné aux 16-25 ans sans emploi ni formation constitue un tremplin vers l’emploi et l’autonomie. Un acquis CFDT.

Sur le front de l’emploi, les bonnes nouvelles sont rares. Aussi le bilan de la Garantie jeunes, dressé par la Dares dans une étude publiée à la mi-avril, ne peut que réjouir. « Ce dispositif, lancé à l’automne 2013 dans le cadre du plan pauvreté pour toucher des jeunes souvent hors des radars, peu de monde y croyait », se souvient Inès Minin, secrétaire nationale chargée des jeunes. Pourtant, cinq ans plus tard, les chiffres sont là. Entre octobre 2013 et juillet 2018, 229 000 jeunes ont intégré le dispositif. Et 29,9 % sont en emploi en moyenne huit mois après leur entrée en Garantie jeunes, 41 % au bout de dix-neuf mois. Surtout, c’est là le principal enseignement de cette étude, la Garantie jeunes aurait augmenté le taux d’emploi des bénéficiaires de 10 points onze mois après l’entrée. Autrement dit, le taux d’emploi de 29,9 % des bénéficiaires n’aurait été que de 20 % sans la Garantie jeunes.
Une montée en charge arrachée par la CFDT
Des missions locales dont les finances sont mises à mal Comment faire plus avec moins ? À l’heure où l’État fixe un objectif ambitieux de 500 000 contrats Garantie jeunes signés d’ici à la fin du quinquennat, dont 100 000 nouvelles entrées dans le dispositif en 2019, les missions locales font face à de graves difficultés financières. Ces structures associatives présidées par des élus locaux, sont financées à 50 % par l’État et à 50 % par les collectivités territoriales. Or l’État vient de changer les règles. « Nous recevons habituellement 80 % de la subvention d’État en début d’année mais, cette année, il a été décidé de ne verser que 50 % de la subvention, et ce, pour toute l’année 2019 », s’indigne Jean-Michel Mourouvin, secrétaire général du Syndicat national des métiers de l’insertion (Synami). À cela s’ajoute la baisse des subventions accordées dans le cadre des conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO) signée entre l’État et chaque mission locale. Il s’ensuit une déstabilisation du budget des missions locales, selon le Synami, qui alerte dans un récent communiqué sur un risque de « disparition de pans entiers du réseau ». Selon le syndicat, le déficit des missions locales, de 50 000?à 500 000 euros selon la taille des structures, pourrait entraîner une perte d’effectifs de l’ordre de 8 %. Le défi d’une extension de la Garantie jeunes à 500 000 bénéficiaires avec un budget réduit de moitié semble dès lors intenable, sauf à ce que le gouvernement évolue sur sa position, ce que réclament l’Union nationale des missions locales (UNML) et le Synami. |
« Pour évaluer l’impact d’un dispositif, il ne suffit pas d’observer les taux de retour à l’emploi. Il faut pouvoir apprécier ce que produisent les politiques d’emploi sur une génération, et mesurer ce qu’aurait été le devenir de ces jeunes sans la Garantie jeunes », précise Inès Minin.
Expérimentée en 2013 sur une dizaine de territoires, la Garantie jeunes s’est déployée par vagues successives, sous l’impulsion de la CFDT, qui a obtenu lors de la Conférence sociale de 2014 sa montée en charge avec un objectif de 100 000 jeunes concernés fin 2015. « On était seuls à le porter mais nous n’avons rien lâché », poursuit la secrétaire nationale. Au 1er janvier 2016, tous les territoires volontaires proposaient le dispositif, déployé dans 80 % du réseau des missions locales, chargées de sa mise en œuvre. Il faudra cependant attendre janvier 2017 pour qu’il soit généralisé à l’ensemble du territoire* et devienne ce droit universel pour tous les jeunes de moins de 26 ans ni en emploi, ni en études, ni en formation, et en situation de précarité sociale et financière. « Un quart d’entre eux a déjà connu dans sa vie de grosses difficultés de logement et 6 % étaient dans une situation de logement instable ou sans abri », précise d’ailleurs la Dares.
Accompagnement intensif
Chapeautée par les missions locales, la Garantie jeunes se traduit par un accompagnement spécifique et intensif liant ateliers collectifs et entretiens individuels – l’objectif étant d’aider les jeunes à se resocialiser pour faciliter leur insertion dans le monde du travail. « Il n’y a pas de secret : si le dispositif fonctionne, c’est parce qu’il concentre les moyens sur l’accompagnement intensif des personnes, note le Centre d’études de l’emploi et du travail (CEET). La Garantie jeunes a été pensée comme une aide à la fois sociale et professionnelle. Et c’est un point essentiel : aucune politique de réinsertion ne peut fonctionner si l’on ne tient pas compte de la vulnérabilité des personnes. » Selon la logique du work first (le travail d’abord), les jeunes doivent multiplier les mises en situation professionnelle – en stage, immersion et période d’emploi. « Deux tiers des bénéficiaires ont bénéficié au moins d’une immersion en entreprise, d’une durée de 54 jours en moyenne », révèle l’étude de la Dares.
Objectif 500 000
Avec le plan pauvreté 2018-2022, Emmanuel Macron s’est engagé à multiplier le nombre d’entrées dans le dispositif – avec un objectif de 500 000 bénéficiaires d’ici à la fin du quinquennat – dans le cadre de sa politique de lutte contre le chômage massif des jeunes. Si l’ambition est louable, elle devra selon la CFDT trouver les moyens de toucher ceux qui en ont le plus besoin. « Si la majorité des bénéficiaires étaient déjà connus de la mission locale au moment de leur entrée dans le dispositif, la France compte encore 1,8 million de jeunes sans formation et sans emploi, dont beaucoup remplissent les critères de la Garantie jeunes », explique Inès Minin. Pour ceux-là, la construction d’une société d’inclusion par le travail ne pourra se faire qu’en étroite collaboration avec l’ensemble des acteurs sociaux et les associations. Un long chemin.
* Le dispositif est inscrit dans le Parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (Pacea) des jeunes instauré par la loi Travail.
photo @MartaNascimento / Réa