Cas général (prise de congés)

Les congés payés sont des périodes de repos impératives, l’employeur doit mettre en mesure les salariés d’exercer effectivement ce droit chaque année. Il en résulte qu’en principe, ni l’employeur, ni le salarié ne peuvent exiger que les congés soient reportés sur l’année suivante ou pris par anticipation. Pour autant, il arrive que des situations ou événements extérieurs empêchent la prise effective du congé.
Les règles à connaitre pour poser ses congés payés
Sur quelle période peut-on prendre ses congés ?
On distingue la période de référence pour l’acquisition des congés (voir durée des congés) et la période au cours de laquelle les congés peuvent être posés : c’est la période dite de prise des congés payés.
Cette période est déterminée pour chaque entreprise, par accord collectif ou à défaut par l’employeur après avis du CSE [1]. Elle comprend obligatoirement – sans dérogation possible - la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année [2].
Ex. Un salarié embauché le 1er juin 2023 disposera de 30 jours ouvrables de CP au 31 mai 2024. Très souvent, la période retenue pour poser les CP va s’étendre du 1er mai 2024 au 31 mai 2025 [3].
Toutefois, les congés acquis peuvent en réalité être pris dès l’embauche depuis 2016 [4]. Cela permet à un nouvel embauché de prendre ses CP sans avoir à attendre la fin de la période d’acquisition qui peut durer presque 1 an (comme c’est le cas dans notre exemple). Cette règle est d’ailleurs applicable à l’ensemble des salariés. Dans les deux cas, il faut bien sûr que la période de prise des congés payés soit ouverte et respecter l’ordre des départs en congé.
Combien de jours de congés peut-on poser ?
Durée maximale et minimale
La durée des congés ne peut excéder 24 jours ouvrables [5] consécutifs, soit 4 semaines. Il s’agit du congé dit principal. C’est une règle d’ordre public, ce maximum de jours consécutifs ne peut être réduit par accord collectif.
L’employeur à l’obligation d’accorder un minimum de 12 jours consécutifs de CP pendant la période légale de prise des congés ou celle définie par accord collectif (incluant dans tous les cas la période du 1er mai au 31 octobre).
Il découle de cette règle que la 5e semaine de CP ne doit pas, en principe, être accolée au congé principal. Toutefois, par dérogation individuelle peuvent prendre plus de 24 jours ouvrables d’une traite [6] :
les salariés justifiants de contraintes géographiques particulières ;
salariés qui justifient de la présence au sein du foyer d’un enfant ou d’un adulte handicapé ou d’une personne âgée en perte d’autonomie.
Les congés supplémentaires pour fractionnement
Lorsque le congé principal est fractionné au-delà des 12 jours consécutifs et qu’une partie de ces jours est prise en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre (période de congé principale), le salarié peut bénéficier de jours supplémentaires, dits « jours de fractionnement ». Ces règles de fractionnement sont définies par un accord d’entreprise, ou à défaut de branche.
À défaut d’accord collectif, la loi fixe ce nombre de jours supplémentaires [7]. Cela varie en fonction de la quantité de jours qui ont été pris en dehors de la période principale et dans la limite des 24 jours. Il y a donc 12 jours maximum (soit 24 jours - 12 jours non fractionnables), qui sont susceptibles d’être pris au-delà de la période de congé principale [8]. Ainsi, le salarié bénéficie de :
- 2 jours ouvrables supplémentaires lorsqu’au moins 6 jours sont pris en dehors de la période de congé principale,
- 1 jour ouvrable supplémentaire lorsque ce nombre de jours est compris en 3 et 5 jours.
La 5e semaine de CP n’est pas prise en compte pour l’ouverture du droit à ce supplément.
Les jours de fractionnement peuvent être supprimés ou réduits par un accord collectif [9]. Par ailleurs, un salarié peut individuellement accepter de renoncer au bénéfice des jours de fractionnement [10]. Le renoncement du salarié ne se présume pas et l’employeur doit en rapporter la preuve.

Combien de jours faut-il avoir travaillé pour bénéficier des jours de fractionnement ?
Il n’est pas nécessaire d’avoir travaillé toute l’année pour bénéficier de jours de fractionnement, il suffit d’en remplir les conditions. Ainsi, un salarié embauché en cours d’année aura-t-il par exemple droit à 1 jour de fractionnement dès lors qu’il aura acquis au moins 15 jours de congé payé, qu’il en aura pris 12 sur la période légale, lui laissant ainsi 3 jours à prendre en dehors de la période de congé principal.
À quelle date vais-je pouvoir partir en congés payés ?
Si vous êtes plusieurs dans un établissement ou un service à vouloir partir durant la même période (ce qui arrive souvent notamment en été ou à Noël) et que l’activité de l’entreprise ne le permet pas, il est nécessaire de déterminer un ordre des départs.
L’ordre des départs
Cet ordre est défini par accord collectif [11] (prioritairement par l’accord d’entreprise). A défaut d’accord, la décision revient à l’employeur après avis du CSE [12].
Il doit alors tenir compte des critères suivants.
- La situation de famille des bénéficiaires : des possibilités de congé, dans le secteur privé ou la fonction publique, du conjoint ou du partenaire lié par un PACS et l’éventuelle présence au sein du foyer d’un enfant ou d’un adulte handicapé ou d’une personne âgée en perte d’autonomie.
En outre, les conjoints et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité travaillant dans une même entreprise ont droit à un congé simultané [13]. L’employeur n’est en revanche pas tenu d’accorder les congés du salarié en fonction des dates du conjoint salarié d’une autre entreprise ;
- La durée de leurs services chez l’employeur.
- Leur activité chez un ou plusieurs autres employeurs.
Une fois déterminé, l’ordre des départs est communiqué par tout moyen, à chaque salarié un moins avant son départ [14].
L’accord doit également préciser les délais que doit respecter l’employeur s’il entend modifier l’ordre et les dates de départ[15].
Le respect des dates de départ
Lorsqu’elles sont fixées, les dates de départ s’imposent tant à l’employeur qu’au salarié, qui doivent ensemble les respecter. L’employeur peut toutefois les modifier à condition d’en informer le salarié dans un délai désormais fixé par un accord d’entreprise ou d’établissement ou à défaut, de branche [16]. À défaut d’accord collectif, le délai de prévenance à respecter par l’employeur est fixé à 1 mois avant la date de départ du salarié, sauf circonstances exceptionnelles [17].
Le fait pour un employeur de modifier les dates de congé d’un salarié moins d’1 mois avant son départ peut constituer un abus de droit s’il ne justifie pas de circonstances exceptionnelles. Aussi, le licenciement d’un salarié qui, informé la veille de son départ par son employeur de la modification de ses dates de congés, était malgré tout parti, a-t-il été jugé sans cause réelle et sérieuse [18].
En dehors de cette hypothèse, le salarié est, pour sa part, également tenu de respecter les dates de départ fixées par l’employeur. Il ne peut décider seul de partir de façon prématurée, sans s’exposer à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement. De la même manière, un retour tardif du salarié (ou la non reprise de son poste à l’issue de ses congés) peut justifier un licenciement, voire un licenciement pour faute.
Le report des congés payés
Si les congés acquis au titre de l’année de référence antérieure doivent en principe être épuisés au terme de l’année de référence en cours, la loi prévoit néanmoins, dans des cas bien précis, la possibilité de reporter des congés d’une année sur l’autre [19].
En cas d’aménagement du temps de travail
Lorsque la durée du travail d’un salarié est décomptée sur l’année (forfaits sur l’année, aménagement du temps de travail sur l’année par exemple), un accord collectif peut prévoir la possibilité de reporter les congés ouverts au titre de l’année de référence sur l’année suivante [20]. Dans ce cas, le report de congé peut être effectué jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle pendant laquelle la période de prise de ces congés a débuté.
Report de la 5e semaine de congé en vue d’un congé sabbatique ou pour créer une entreprise.
La 5e semaine de CP peut faire l’objet de reports, sur 6 années au maximum, en vue de prendre un congé sabbatique ou un congé pour création d’entreprise ou pour l’exercice de responsabilités de direction au sein d’une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante [21].
Report de la 5e semaine en vue d’être placée sur un compte épargne-temps
Les salariés peuvent affecter à leur compte épargne-temps, dans les conditions fixées par l’accord collectif l’instituant, tout ou partie de leur congé annuel excédant 24 jours ouvrables [22].
Autres cas de report lié à des absences
Le report des congés est également possible dans d’autres cas. La loi le prévoit expressément pour les salariés de retour de congé de maternité ou d’adoption. Pour les règles de report en cas d’accident ou de maladie professionnelle ou non, voir ici.
[1] Art. L.3141-15 et -16 C.trav.
[2] Art L.3141-13 C.trav.
[3] Une nouvelle période de prise des congés s’ouvrira au 1er mai 2025.
[4] Art. L.3141-12 C.trav.
[5] Art L.3141-17 C.trav.
[6] Art. L.3141-17 C.trav.
[7] Que l’initiative de la demande de fractionnement émane de l’employeur ou du salarié.
[8] Art L. 3141-23 c.trav.
[9] Art. L.3141-21 C.trav.
[10] Art. L.3141-23 C.trav.
[11] Art L.3141-15, 2° C.trav.
[12] Art L.3141-16, 1°-b C.trav.
[13] Art L.3141-14 C.trav.
[14] Art D.3141-6 C.trav.
[15] Art L.3141-15, 3° C.trav.
[16] La date à retenir pour déterminer le point de départ du délai d’un mois est la date de remise au salarié de la lettre modifiant son départ (Cass.soc.04.03.03, n°00-45410).
[17] Art. L.3141-16 C.trav.
[18] Cass.soc., 23.02.02, n°99-46143.
[19] Art L.3141-22 C.trav.
[20] Art L.3141-22 C.trav.
[21] Art L.3142-118 et L. 3142-120 à L.3142-124 C.trav. (congé pour création d’entreprise) ; art L.3142-33 et L.3142-35 C.trav. (congé sabbatique).
[22] Art L.3151-1 à L.3151-3 C.trav.