
Ces militants CFDT qui agissent auprès des migrants
Sur tout le territoire, des militants CFDT s’investissent auprès des migrants. Petit tour d’horizon à l’occasion de la journée internationale qui leur était consacrée, le 18 décembre.

Une fois par trimestre, la CFDT de Villeurbanne transforme son local en salle de cours de droit du travail destiné aux quelques personnes bénéficiant du statut de réfugié. « Avec notre casquette de syndicaliste, nous ne savons pas toujours comment agir pour soutenir les migrants, témoigne Sonia Paccaud, secrétaire régionale chargée des luttes contre les discriminations en Auvergne-Rhône-Alpes. En vue de les préparer à une meilleure intégration, nous avons ouvert ces ateliers il y a deux ans. » David Saint-Sulpice, militant CFDT et défenseur syndical, s’y investit. « Nous intervenons auprès de personnes qui ont la possibilité de travailler sur notre territoire. » En moyenne, cinq ou six migrants assistent à chacune des sessions. « Un petit vernis juridique », explique-t-il, suffisant pour obtenir un minimum d’informations avant la signature d’un contrat.
Une certaine vision de la société et de la solidarité
La CFDT soutient une “Europe accueillante” À l’occasion de la journée internationale des migrants, le 18 décembre, la CFDT, avec la Confédération européenne des syndicats et plus de 200 ONG, « appelle les travailleurs et les citoyens à soutenir massivement l’initiative citoyenne européenne Europe accueillante afin d’obtenir un débat au Parlement européen pour l’accueil des migrants dans des conditions dignes sur notre continent ». Elle s’est également réjouie que la France ait respecté ses engagements et signé le pacte de Marrakech, malgré « la désinformation orchestrée par les partis d’extrême droite ». |
Une action syndicale comme une autre ? « Bien sûr, répond Frédéric Sève, secrétaire national. La question migratoire est une question citoyenne, et les travailleurs sont des citoyens. La CFDT, collectif de travailleurs porteurs de valeurs et d’une vision de la société, s’y intéresse naturellement. L’intégration et la régularisation par le travail, la lutte contre les discriminations liées à l’origine, c’est bien notre cœur de métier. » « Nous sommes là en soutien aux personnes les plus en difficulté dans l’entreprise, prolonge David. Les demandeurs d’asile en font partie. »
Ce soutien, le militant l’a poussé à l’intérieur même de son entreprise, ISS Propreté. « J’ai sollicité ma direction pour signer une convention prévoyant l’embauche de personnes ayant le statut de réfugié. » Avec l’aval de sa section et le soutien d’une association, JRS Welcome, ils se sont mutuellement fixé un objectif en décembre 2017 : recruter cinq migrants en 2018 sur un effectif de 23 000 personnes. Rien d’insurmontable. Onze mois plus tard, les résultats ne sont pourtant pas au rendez-vous, faute de proposition tangible de la direction. Mais David ne se résigne pas. « Rien n’est fini. »
Pour Mouhamed Touré, délégué syndical central CFDT de Starbucks, la démarche a été toute autre. Au début de l’année 2017, en réponse aux décrets anti-immigration du président américain Donald Trump, le fondateur du groupe Starbucks décide d’intégrer 2 500 réfugiés dans ses effectifs. La direction France lui emboîte le pas et s’engage à recruter dix migrants par an. La démarche est aussitôt appuyée par le délégué CFDT, qui insiste sur « l’implication volontaire nécessaire des managers pour mettre les réfugiés dans les meilleures conditions d’intégration possibles. Beaucoup d’entre eux ont déjà travaillé dans leur pays d’origine. Leur première difficulté c’est la langue ». Très vite, Mouhamed se lie d’amitié avec l’un eux, Fayçal, dont il souligne les « incroyables progrès en français ».
Une relation privilégiée grâce aux Duos de demain
Cette histoire humaine, c’est le fondement même de l’initiative Duos de demain, lancée en février 2016 par la CFDT et l’ONG France Terre d’Asile. Son principe ? Créer une relation privilégiée entre un réfugié et son parrain, militant CFDT. Gaël David participe à l’opération depuis un an. « Nous habitons le 10e arrondissement de Paris, tout près d’un camp qui a abrité près de 2 000 réfugiés. Quand on est témoin d’une telle misère, on se demande comment intervenir. » En accompagnant Alpha, un réfugié politique guinéen de 49 ans, il « donne du corps à ses valeurs ». « Dans les territoires, il est important que nous fabriquions des partenariats d’action avec ceux qui partagent notre revendication d’une politique migratoire réaliste, cohérente et humaine, insiste Frédéric Sève. Les problématiques migratoires se déclinent différemment selon les régions et les villes. Il ne faut pas les réduire à des postures idéologiques, quelles qu’elles soient. » En Île-de-France, c’est l’appui aux sans-papiers employés depuis plus de trois ans dans la restauration ou la propreté qui occupe le quotidien de Pascale Breuil-Kaci, permanente à l’UD de Paris : « Nous ne prenons que des dossiers viables et complets pour que les personnes n’aient pas une obligation de quitter le territoire en cas d’échec. Personne n’a intérêt à laisser ces situations s’enkyster : ni les sans-papiers ni les employeurs. Une fois la situation réglée, la majorité d’entre eux restent à leur poste. »
Plus à l’ouest, autre situation, autre urgence. En septembre dernier, 600 migrants, la plupart éligibles à un statut de demandeur d’asile, vivaient sous des tentes de fortune dressées dans les rues de Nantes. « Nous avons rencontré la Ville à plusieurs reprises pour ouvrir des hébergements dans cinq gymnases », confie Franck Truong, secrétaire général de l’UD de Loire-Atlantique. Sa légitimité à s’imposer à la table des discussions, la CFDT l’a gagnée au gré de ses combats en faveur des populations sans domicile fixe. La prise en charge des migrants s’inscrit dans cette continuité. « Nous faisons partie d’un collectif avec la Cimade, Médecins du monde, l’association de solidarité avec les migrants Gasprom, le Secours catholique, etc. Tous les mois, nous réunissons un groupe de suivi afin de faire le point sur la situation. » Pour que cette question ne soit pas qu’une histoire d’un jour.