La CFDT vous explique : les nanotechnologies

Publié le 28/07/2022

Sujet trop absent du débat politique, les nanotechnologies sont pourtant très présentes dans notre consommation. De l’alimentation aux cosmétiques en passant par le textile, elles posent aujourd’hui de nombreuses questions quant aux éventuels risques de leur utilisation massive. La CFDT vous propose un petit aperçu des enjeux.

Des nanotechnologies ultra-présentes

Nanotechnologies : comprendre les enjeux

Les techniques de manipulation de matériaux à l’échelle « nano » (c.a.d. entre 1 et 100 milliardièmes de mètre) sont regroupées sous l’appellation « nanotechnologies ». Celles-ci sont divisées en trois types distincts :

  • Nanomatériaux : matériaux créés intentionnellement pour des usages définis.
  • Nanoparticules naturelles : matière existant naturellement sans procédé humain, comme la poussière volcanique.
  • Nanoparticules incidentelles : matière produite involontairement par l’activité humaine, de la combustion du bois aux moteurs thermiques.

Depuis l’invention du premier microscope à force atomique dans les années 1980, leur usage s’est rapidement répandu. En effet, ceux-ci sont dotés de propriétés intéressantes pour l’industrie. On peut citer les propriétés antibactériennes du nano-argent, celles anti-UV du nano-titane ou encore les effets antiagglomérants de la nano-silice.

Jusqu’au début des années 2000, le terme « nano » était devenu un argument de vente en soi, incarnant futurisme et modernité se mettant au service des consommateurs et consommatrices. Depuis, la situation a quelque peu évolué face aux manques de certitude quant aux potentiels effets néfastes des nanotechnologies. En effet, du fait de leur taille, celles-ci peuvent facilement traverser les barrières physiologiques du corps humain et se diffuser via les systèmes nerveux, sanguins et lymphatiques. Le corps humain n’étant généralement pas capable de les éliminer, des questions majeures de santé publique se posent quant à leur utilisation massive dans tous les aspects de nos consommations quotidiennes.

Les nanotechnologies aujourd’hui

Chaque année, la France produit plusieurs centaines de milliers de tonnes de nanomatériaux et en importe environ 500 000 autres (en particulier le noir de carbone, utilisé dans la fabrication des pneumatiques et de certains cosmétiques). Depuis les années 2010, les pouvoirs publics français et européens se sont emparés du sujet des nanotechnologies et de leurs risques, potentiels ou avérés, pour la santé du public. La France a par exemple rendu obligatoire en 2013 le recensement de leur usage par l’industrie à travers R-Nanos. Elles sont également inclues dans REACH depuis 2020 à travers un processus d’enregistrement renforcé et clarifié.

Certaines nanotechnologies sont d’ailleurs aujourd’hui en voie de retrait du marché du fait de leurs effets néfastes avérés ou supposés. En l’espèce, on peut noter l’interdiction de l’additif alimentaire E171 (dyoxide de titane) à compter du 7 août 2022 par l’Agence européenne de sécurité alimentaire, suite à la décision du Centre international de recherche sur le cancer de le classer comme cancérogène.

L’action syndicale au service de la santé publique : les réponses de la CFDT

La CFDT ne saurait éluder un sujet industriel majeur, qui présente de surcroît des risques pour la santé. Elle identifie trois angles pour traiter les questions de santé liées aux nanotechnologies :

  • Santé au travail: les nanotechnologies peuvent affecter les conditions de travail ainsi que la santé des travailleurs et travailleuses tout le long du processus de production et de traitement des déchets. La CFDT s’engage pour protéger les travailleurs concernés.
  • Santé environnementale: les nanotechnologies affectent négativement notre environnement par leur accumulation. La CFDT œuvrera à la prévention de leur diffusion et accumulation.
  • Santé publique: les consommateurs sont concernés par les nanotechnologies et par les potentiels risques pour leur santé.

La CFDT est engagée avec ses partenaires sur le sujet des nanotechnologies (Anses, Avicenn, fédérations syndicales concernées, INRS, etc.). À ce titre et forte de son expérience accumulée, elle propose plusieurs pistes d’action et de réflexion :

  • La transparence et le partage des informations sur l’utilisation des nanotechnologies dans les processus industriels.
  • La traçabilité des expositions lors de l'activité professionnelle en tenant compte du cycle de vie des produits (comme le montre l’exemple des nanoparticules de carbone dans les cadres de vélo : utilisés lors de la production et libérés lors de la destruction du cadre au stade du traitement des déchets).
  • L'application du principe de précaution et notamment le concept No Data/No Market inscrit dans REACH. Les études sont aujourd’hui trop lacunaires pour qu’on puisse déterminer avec certitude que l’utilisation de la plupart des nanomatériaux sont sans danger pour la santé et l’environnement.
  • La distinction entre les usages utiles et futiles, en prenant notamment en compte la balance bénéfice/risque dans l'usage des nanomatériaux : par exemple l’usage du nitrate d'argent aux propriétés antibactériennes dans les couvertures de protection destinées aux grands brûlés peut sembler justifié alors qu’il ne l’est pas dans les vêtements de sport antitranspirants, avec lesquels il y a une possibilité de pénétration dans le corps puis une dissémination dans l'environnement par l’intermédiaire des eaux usées lors des lavages en machine.
  • L’interdiction de l’usage de nanomatériaux lorsque ceux-ci ne sont pas indispensables et présentent un risque pour la santé. À ce titre, nous devons militer pour l’interdiction du dioxyde de titane dans les produits cosmétiques, dans le prolongement de son interdiction comme additif alimentaire.

Clés de lecture

Anses : L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail est un établissement public contribuant à assurer la sécurité sanitaire humaine. Son champ de compétence en fait la plus grande agence sanitaire d’Europe.

Avicenn : Il s’agit d’une association non-gouvernementale de veille et d’information sur les enjeux des nanotechnologies et nanosciences. Elle participe à l’information des décideurs nationaux et européens.

INRS : L’Institut National de Recherche et de Sécurité est une association loi 1901 gérée de manière paritaire entre syndicats patronaux et de travailleurs. Cette association est sous l’égide de la Sécurité Sociale et travaille pour la prévention des maladies et accidents professionnels.

No Data / No Market : Ce principe établit qu’un produit ne peut entrer sur un marché donné que si le producteur peut apporter la preuve (dans la limite de la certitude scientifique) de son absence de risques pour la santé publique.

REACH : Le Registration, Evaluation, Autorisation and Restriction of Chemicals est un règlement européen répertoriant les matériaux utilisés par l’industrie chimique ainsi que leurs risques potentiels. Tous les producteurs doivent y enregistrer les matériaux utilisés, identifier les risques potentiels, et démontrer leur capacité à gérer ces risques.

R-Nanos : R-nanos est un registre dans lequel les entreprises doivent enregistrer les nanomatériaux qu’elles utilisent. Il s’agit d’une extension de REACH.