APLD Rebond : il est temps de négocier !
Depuis la loi n°2025-127 du 14 février 2025 instaurant un dispositif d’activité partielle de longue durée dit « Rebond » (APLDR), les équipes étaient en attente du décret afin de pouvoir en négocier la mise en place. Un projet de décret en Conseil d’État relatif à l’activité partielle de longue durée Rebond a été transmis pour avis aux membres de la Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP, au sein de laquelle est présente la CFDT) en fin de semaine dernière. Nous vous en livrons un premier décryptage.
Un dispositif assez similaire à celui de 2020…
L’« activité partielle de longue durée rebond » (ci-après APLDR) est très similaire l’activité partielle de longue durée mise en place en 2020, avec quelques différences néanmoins.
Un recours toujours subordonné à l’existence d’un accord collectif quel que soit son niveau (art.193, I et II)
La loi prévoit que le dispositif d’APLDR est « destiné à assurer le maintien dans l'emploi des salariés dans les entreprises confrontées à une réduction d'activité durable qui n'est pas de nature à compromettre leur pérennité » (article 193, I).
Comme en 2020, le recours à, l’APLD Rebond est subordonné à la conclusion préalable d’un accord collectif. Cet accord doit préciser (projet de décret, art.1, II) :
La date de début et la durée d'application du dispositif d'activité partielle de longue durée rebond ;
Le périmètre des établissements, activités et salariés auxquels s'applique ce dispositif ;
La réduction maximale de l'horaire de travail en deçà de la durée légale de travail ou, lorsqu’elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat sur la période considérée ;
Les engagements en matière de maintien dans l'emploi et de formation professionnelle.

Bon à savoir
L’accord précise la liste des actions mentionnées à l’article L. 6313-1 du Code du travail proposées aux salariés inclus dans le périmètre de l’accord, les modalités de financement de ces actions et d’information des salariés à leur sujet. Les engagements en matière de formation professionnelle de l'établissement, de l'entreprise, du groupe ou de la branche ont notamment pour objectif le développement des compétences des salariés afin de favoriser leur mobilité professionnelle et répondre aux besoins mentionnés dans le diagnostic qui doit obligatoirement être établi en préambule de l’accord (art. 1er, I, 3° du projet décret)
Les modalités d'information des organisations syndicales de salariés signataires et des institutions représentatives du personnel (cette information doit être a minima trimestrielle).
L’accord peut être un accord d’entreprise, d’établissement, de groupe, voire de branche. En cas de recours sur le fondement d’un accord de branche, l’employeur doit consulter le CSE, s’il existe, sur le document unilatéral en précisant la mise en oeuvre.
Pour la CFDT, il est tout d’abord regrettable qu’il n’y ait aucune obligation d’ouvrir une négociation en présence d’un délégué syndical dans l’entreprise, l’établissement ou le groupe et que l’employeur puisse adopter des dispositions unilatérales dès lors qu’elles sont conformes à l’accord de branche et qu’il consulte le CSE.
Un contrôle plus ou moins poussé selon qu’un accord ou un document unilatéral est transmis à l’administration (art.193, III et IV)
L’accord d’entreprise, d’établissement ou de groupe ou le document unilatéral sont soumis à validation/homologation par l’administration. L’accord de branche, dont la conclusion conditionne le recours à un document unilatéral portant sur les modalités précises de sa mise en œuvre dans l’entreprise ou l’établissement, doit avoir été étendu. Le contrôle de l’administration est plus ou moins poussé selon qu’il s’agit d’une homologation (document unilatéral) ou d’une validation (accord collectif).
La décision de l’administration intervient dans les 15 jours en cas de demande de validation et dans les 21 jours en cas de demande d’homologation (art.193, VI).
L’administration contrôle le respect des engagements et peut refuser le renouvellement des aides ou en demander le remboursement en cas de non-respect (art.193, I).
Non-cumul avec l’APLD classique
Il n’est pas possible de cumuler concomitamment le bénéfice de l’APLDR et de l’APLD version 2020. Dispositif qu’il n’est de toute façon plus possible de mobiliser depuis janvier 2023. Cette interdiction de cumul ne concerne donc que les entreprises qui sont toujours couvertes à cette date (art.193, VIII).
Durée du bénéfice de l’APLD et entrée en vigueur du dispositif
La durée maximum de bénéfice du dispositif est de 18 mois consécutifs ou non sur une période pouvant aller jusqu’à 24 mois (à compter du 1er jour d’autorisation de la demande). La date de bénéfice du dispositif ne peut être antérieure au 1er jour du mois civil au cours duquel la demande de validation/homologation est déposée (Art. 3 du projet de décret).
Par conséquent, si le décret parait bien en mars, le bénéfice du dispositif ne pourra être accordé qu’à compter du 1er mars.

Bon à savoir
C’est d’ailleurs bien ce que prévoit l’article 193, VIII de la loi du 14 février 2025 : une application aux accords ou documents unilatéraux transmis à l’administration pour validation/homologation entre le 1er mars 2025 et le 28 février 2026.
Rebondir, mais en mieux : principales améliorations
Comme en 2020, l’accord doit prévoir un diagnostic partagé. Cependant, au diagnostic sur la situation économique est ajouté un diagnostic des besoins en termes de compétences (art.1, I, 3° du projet de décret). De plus, les engagements, que les entreprises doivent prendre en matière de formation doivent être précisés en référence au diagnostic (art.1, II, 4° du projet de décret).
Que ce soit dans la loi ou dans le décret, l’accent est mis sur la formation : engagements pris par l’entreprise, sanction du non-respect et, last but not least, indemnisation du salarié à 100% lorsqu’il est formation (article 10 du projet de décret).
Contrairement à l’APLD de 2020, dont certains salariés étaient exclus (salariés en CDD…), le bénéfice du dispositif est ouvert à tous les salariés (l'article 193 de la loi vise les salariés de manière générale).
Par ailleurs, l’accord peut prévoir des actions spécifiques de maintien dans l’emploi des salariés âgés de plus de 57 ans (art.1er, IV, 4° du projet de décret). C’est une évolution par rapport au texte de 2020, mais on peut regretter qu’il ne s’agisse que d’une clause facultative.
L’administration pourra recouvrer les aides perçues en cas de non-respect des engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle (art.6, II).
En revanche, lorsque la réduction de l’horaire de travail excède les limites prévues (40% en principe, 50% par exception) : la demande de remboursement des aides par l’administration est obligatoire (art.4 dernier alinéa du projet de décret).
Les points déceptifs
Si les aides perçues pourront être recouvrées en cas de non-respect des engagements en termes d’emploi, le projet de décret limite la portée des engagements sur l’emploi aux salariés licenciés pour motif économique, autorisant donc l’employeur à supprimer les emplois de ces salariés via un accord de rupture conventionnelle collective ou un accord de performance collective (art.7, I), ce que la CFDT a critiqué dans son avis.
Par ailleurs, l’administration pourra ne pas renouveler les aides dans certains cas, dont le non-respect des engagements en matière de formation et d’emploi (art.2, alinéa 6). Cependant, il n’existe aucune obligation de l’administration de refuser le renouvellement dans les cas cités, y compris lorsque les circonstances justifiant le maintien d’une baisse d’activité durable ne sont plus réunies, ce qui paraît très curieux.
Enfin, les engagements des dirigeants demeurent facultatifs (art.1, III).
Espérons que la consultation aura permis d’améliorer le texte !