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Défenseurs syndicaux: vous devez informer votre employeur de votre mandat pour bénéficier de la protection

Publié le 13/02/2019

Le défenseur syndical, s’il veut pouvoir bénéficier de la protection attachée à son mandat, doit informer son employeur de son mandat extérieur ou être en capacité de prouver que celui-ci était au courant. Peu importe qu’il existe aujourd’hui une obligation d’information de l’employeur par la Direccte. Si bien qu’en cas d’absence d’information de l’employeur par l’administration et le salarié, la protection ne joue pas. C’est ce que vient de préciser la Cour de cassation. Cass.soc.16.01.19, n°17-27.685.

Pas d’information de l’employeur, pas de protection ! Il y a tout juste un an, vous étiez nombreux à vous poser la question lors du rassemblement national des défenseur syndicaux CFDT. Le fait que la Direccte ait désormais l’obligation de prévenir l’employeur du mandat de défenseur syndical d’un de ses salariés, dispense-t-il ou non le défenseur syndical de prévenir l’employeur de son mandat extérieur pour bénéficier de la protection ? La réponse est non! A l’époque, dans le doute, nous vous avions conseillés de prévenir votre employeur. Aussi, si tel n’est pas encore le cas, ne tardez pas…

  • Rappel sur le nouveau statut du défenseur syndical et la protection attachée au mandat

Depuis la loi Macron de 2015, le défenseur syndical bénéficie d’un véritable statut. Il est désormais désigné par la Direccte dans chaque région sur présentation des organisations syndicale. Selon l’article D.1453-2-7 du Code du travail, la Direccte doit, par la suite, prévenir l’employeur du « salarié inscrit, de l’acquisition et du retrait de la qualité de défenseur syndical ».  En outre, le défenseur bénéficie de la protection prévue pour les salariés protégés. L’article L.1453-9 prévoit que « le licenciement du défenseur syndical est soumis à la procédure d’autorisation administrative (…) ».

En cas de mandat extérieur, comme c’est le cas ici, La Cour de cassation prévoit que l’employeur doit être informé par le salarié s’il veut être protégé.  Pour rappel, en 2012, suite à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) (1), la Cour de cassation (2) a posé le principe selon lequel le bénéfice du statut protecteur lié à l’un mandat extérieur est subordonné à l’obligation par le salarié d’en avoir informé l’employeur :

-          au plus tard à l’entretien préalable de licenciement ou, s’il s’agit d’une rupture qui ne nécessite pas cet entretien (comme en l’espèce), au plus tard avant la notification de l’acte de la rupture ;

-          ou, faute d’information, le salarié doit prouver que l’employeur en avait connaissance.

A défaut, il ne peut être reproché à l’employeur de ne pas avoir tenu compte du statut protecteur du salarié. Il est en effet concevable qu’il puisse être difficile pour l’employeur de savoir si ses salariés bénéficient d’un mandat extérieur (hors de l’entreprise).

Mais que devient cette obligation d’information de la part du salarié depuis qu’il existe une obligation pour la Direccte d’informer l’employeur ?  L’obligation par le salarié est-elle supprimée? C’est que nous allons voir…

  • Faits, procédure 

Dans cette affaire, un salarié voit sa période d’essai rompue. Il décide de saisir le conseil de prud’hommes car son employeur n’a pas demandé l’autorisation à l’inspection du travail. L’employeur soutient qu’il n’était pas informé du mandat du défenseur syndical et qu’en voie de conséquence, il n’avait pas à demander cette autorisation. Pour le salarié, c’est à la Direccte de prévenir l’employeur. Il demande donc que sa rupture de période d’essai soit déclarée nulle en raison de la violation de son statut protecteur.

  • Pas de présomption d’information de l’employeur

La Cour de cassation confirme la position prise par les juges du fond et rejette les arguments du salarié.

Elle rappelle son principe en la matière et l’applique au cas des défenseurs syndicaux : «il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l’entreprise d’établir qu’il a informé son employeur de l’existence de ce mandat au plus tard avant la notification de l’acte de la rupture, ou que celui-ci en avait connaissance ».

La Haute Cour ajoute donc que si l’employeur n’a pas été informé du mandat extérieur par le salarié et que la Direccte n’a pas remplie son obligation d’information, le salarié n’est pas protégé.

Le salarié doit donc toujours informer son employeur de son mandat extérieur s’il veut bénéficier de la protection liée à son mandat ou à défaut prouver que l’employeur était informé.

Il n’y a pas de présomption d’information de l’employeur 

La Cour de cassation a reconnu que le conseiller prud’homme qui demande des congés pour l’exercice de son mandat extérieur suffit pour les juges à caractériser l’information de l’employeur et permet au salarié de revendiquer le bénéfice du statut protecteur (3).

  • Pas d’infléchissement de la jurisprudence pour le mandat de défenseur syndical

La jurisprudence de 2012 s’applique donc au cas du défenseur syndical. L’obligation d’information ne doit clairement pas pour les juges reposer sur l’administration qui peut être, comme en l’espèce, défaillante.

Il faut également penser qu’en cas de changement en cours de mandat, le nouvel employeur ne sera pas informé par l’administration de l’inscription du salarié sur la liste des défenseurs syndicaux. Rappelons-le, l’obligation d’information pour l’administration a lieu au début du mandat et à la fin du mandat.

 



(1) Décision n°2012-242 QPC du 14.05.12.

(2) Cass.soc.14.09.12, n°11-21307.

(3) Cass.soc.07.02.18, n°16-10.955.