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Licenciement verbal : l’envoi d’une convocation ne suffit pas à régulariser

Publié le 25/01/2017

L'employeur qui ordonne au salarié de quitter l'entreprise prononce un licenciement verbal qui ne peut pas être régularisé a posteriori par l'envoi d'une lettre de convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Cass.soc.10.01.17, n° 15-13.007.

Souvent objet de contournement, la procédure de licenciement est parfois négligée au détriment des droits des salariés. L’occasion pour nous de rappeler au travers de cette décision quelques règles cruciales en la matière.

  • Le licenciement : une procédure stricte 

Strictement encadré par le Code du travail ainsi que par la jurisprudence, la procédure de licenciement se décline en trois étapes. 

- 1e étape: la convocation à un entretien préalable, qui ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la première présentation de la lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) ou la remise en mains propres  de ladite convocation. Ce délai doit permettre au salarié de préparer sa défense. En revanche, il n’y a pas d’entretien préalable pour les licenciements économiques de 10 salariés et plus dans une période de 30 jours dans une entreprise ayant des représentants du personnel.
- la 2e étape: l’entretien préalable entre l’employeur et le salarié, assisté ou non d’un représentant du personnel ou de la personne de son choix. Au cours de l’entretien, l’employeur explique pourquoi il envisage le licenciement et recueille les remarques et observations. C’est aussi à ce moment là que l’employeur doit, le cas échéant, informer les salariés des mesures de reclassement mises en œuvre et proposer un contrat de sécurisation professionnelle (CSP).
- la 3e étape: la notification du licenciement par une lettre précisant les motifs du licenciement, la durée du préavis à effectuer et les droits acquis au titre du droit individuel à la formation. Cette notification par l’employeur doit se faire obligatoirement par lettre recommandée avec avis de réception (1) .

L'employeur qui a recours à un autre mode d'information ne commet pas d'irrégularité. En effet, d’après la chambre sociale de la Cour de cassation  « l'envoi de la lettre recommandée avec avis de réception (...) n'est qu'un moyen légal de prévenir toute contestation sur la date de notification du licenciement» (2). Cette notification permet de rendre incontestables l'existence et la date du licenciement. Mais son absence ne constitue pas, en soi, une irrégularité de procédure.

La problématique est tout autre lorsqu’elle concerne la convocation à un entretien préalable, c’est là tout l’enjeu de la décision de la chambre sociale de la Cour de cassation du 10 janvier 2017.

  • Les faits et la procédure

Dans un premier temps, un employeur a demandé oralement à un salarié de quitter de manière immédiate l’entreprise.  Puis dans un second temps, il a adressé une lettre de convocation préalable à un éventuel licenciement à son salarié pour « retards habituels suite au retrait du permis de conduire, absences prolongés et état d’ébriété ».

Estimant que l'employeur n'avait pas respecté le cadre légal dans lequel s'inscrit la rupture du contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes. La Cour d’appel a jugé que l’envoi ultérieur d’une lettre de convocation à un entretien préalable ne faisant pas état d’une mise à pied conservatoire, venait contredire l’intention de l’employeur de procéder verbalement au licenciement. Dès lors, selon les juges du fond, il n’y avait pas eu licenciement.

Le salarié a donc formé un pourvoi devant la chambre sociale de la Cour de cassation.

  • Un licenciement verbal ne peut être régularisé !

Les magistrats du Quai de l’Horloge ne font que peu d’état de la décision rendue en appel et casse l’arrêt. La chambre sociale de la Cour de cassation estime qu’un employeur qui ordonne au salarié de quitter l’entreprise prononce un licenciement verbal. La Cour ajoute que ce licenciement verbal ne peut pas être régularisé a posteriori par l’envoi d’une lettre de convocation à un entretien préalable de licenciement.

Autrement dit, un licenciement verbal ne peut pas être régularisé par l’envoi ultérieur d’une convocation à un entretien préalable.

La décision de la Haute Cour est logique puisque, par définition, le licenciement verbal est dépourvu de cause réelle et sérieuse, car il intervient en violation de l’impératif légal, à savoir la présence d'une notification écrite et motivée de la rupture (3).

En l’espèce, le licenciement est donc jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse. La décision de la Haute Cour s’inscrit dans la droite ligne jurisprudentielle.

  • Une jurisprudence constante

C’est de manière constante que ce type de comportement est sanctionné par les juridictions. Ainsi, a-t-il été jugé qu’un salarié contraint de restituer les clés lui permettant d’accéder à son lieu de travail alors qu’aucune mise à pied ne lui avait été notifiée a fait l’objet d’un licenciement verbal. Pour la Chambre sociale,  la rupture de son contrat de travail est nécessairement sans cause réelle et sérieuse (4).

Il est également jugé de façon identique « le fait, pour un employeur, de convoquer, après un licenciement verbal, le salarié à un entretien préalable et de lui notifier son licenciement ne régularise pas la rupture du contrat de travail, qui reste sans cause réelle et sérieuse »(5).

(1) Art. L.1232-6 C.trav.
(2) Cass.soc.16.06.09, n°08-40.722.
(3) Cass.soc.23.06.98,n°96-41.688; Art. L.1232-6 C.trav.
(4) Cass.soc.21.09.11, n°10-14927; Cass.soc.09.03.11, n°09-65441.
(5) Cass.soc.17.02.04, n°01-45659 ; Cass.soc.28.05.08, n°07-41.735.

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