#UrgenceEmploi contributions N°2

Publié le 19/06/2020 (mis à jour le 30/06/2020)

Retrouvez ci-dessous les premières contributions #UrgenceEmploi, elles ne sont pas toutes publiées sur cette page et sont condensées dans le document ci-dessous. Ces contributions n'engagent en rien la CFDT et ce qu'elle porte. 

Pour un travail choisi et porteur de progrès social

 

Sans évidemment prétendre apporter une réponse exhaustive, et encore moins définitive, à l’ensemble des questions posées dans le cadre de la consultation #UrgenceEmploi, je souhaiterais alimenter la réflexion commune avec les thèses suivantes :

 

1) l’influence des partenaires sociaux, y compris des syndicats de travailleurs, dépasse de très loin la seule sphère de l’entreprise et du travail, mais leur mandat démocratique découle pour l’essentiel de leur place dans cette sphère. Dans le cas des syndicats de travailleurs, cela se manifeste par des effectifs qui sont dans leur grande majorité composés de salariés alors que leurs revendications et certaines décisions prises avec leur participation peuvent non seulement concerner des salariés non membres, mais aussi des personnes non directement salariées (indépendants, sous-traitants, intérimaires, chômeurs, étudiants…) et pas toujours suffisamment représentées dans les instances de pouvoir.

Si cela ne veut dire pas que les syndicats ont vocation à devenir au niveau national des associations universelles, leur légitimité à prendre position, voire à être co-décideurs dans des sujets comme le droit du travail et l’organisation de la protection sociale qui touchent de fait pratiquement tous les citoyens et certains résidents étrangers serait renforcée si les syndicats comptaient dans leurs rangs plus de membres non salariés. Même les personnes qui ne travaillent pas peuvent en effet être considérées soit comme d’anciens travailleurs (retraités), soit comme de futurs travailleurs (étudiants), soit comme bénéficiant du travail des autres et à ce titre impactées par des questions comme la sécurité et l’hygiène au travail, par exemple dans les hôpitaux. Cela ne concurrencerait les autres types de corps intermédiaires, mais reconnaîtrait au contraire que chaque personne est à la fois un citoyen (au travers notamment de son droit de vote), un travailleur actif ou potentiel (représenté par un syndicat), un passionné d’échecs ou un amoureux des oiseaux... appartenant ou pas aux associations correspondantes.

Une mesure qui faciliterait l’ouverture des syndicats à ces publics serait la création d’un chèque syndical financé non pas par les employeurs, mais par l’État. Il serait ainsi accordé non pas aux seuls salariés, mais à tous les citoyens majeurs et aux résidents étrangers contribuables, de façon analogue aux bons proposés par Julia Cagé afin de financer les partis politiques. En plus d’être plus transparent que l’actuel système de subventions publiques, ce dispositif renforcerait la légitimité des syndicats à jouer un rôle de co-décideur dans des chantiers comme la transition écologique et l’organisation de la protection sociale qui concernent chacun d’entre nous, indépendamment de notre activité professionnelle. La représentativité d’un syndicat ne devrait pas être avant tout mesurée par sa capacité à mobiliser manifestants et grévistes.

 

2) l’extension de l’appartenance et de l’activité syndicales au-delà de la sphère du travail salarié se justifie aussi par l’évolution du paysage du travail au sens large. Alors que pendant les Trente Glorieuses, l’emploi salarié pouvait apparaître comme la norme de la relation de travail et le fondement de la protection sociale (avec néanmoins des exceptions nombreuses pour les agriculteurs, les professions libérales et autres travailleurs indépendants), ce statut, quoique toujours majoritaire, n’est plus aujourd’hui aussi central en raison de nouvelles aspirations sociétales, de transformations économiques et technologiques, de la diversification des formes de travail (intérim, Uber, Foule Factory…) et de l’universalisation de certains droits sociaux comme la protection maladie et les allocations familiales.

Dans le même temps, l’emploi salarié continue à conditionner l’accès à de multiples droits comme en matière de formation et d’activités sociales et culturelles des entreprises. Eu égard aux coûts associés, cela a pour conséquence d’inciter certains employeurs à externaliser davantage l’exercice de certaines fonctions et crée des discriminations entre des travailleurs qui, à travail pourtant identique au profit du même donneur d’ordre réel, seront traités différemment en fonction de leur statut et de leur employeur formels.

Malgré tout, il ne semble ni réaliste, ni désirable de chercher à revenir vers une « société salariale » idéalisée qui, en plus de compter en réalité de nombreuses exceptions, correspondait à une société patriarcale où les employés étaient subordonnés à leurs patrons comme les femmes à leurs maris. Même si l’universalisation des droits sociaux sur la base d’un critère de citoyenneté et/ou de résidence a eu mécaniquement pour effet d’affaiblir le statut attaché au travail salarié et donc parfois, le rôle de co-décision des syndicats, il s’agit d’un progrès social que les syndicats qui approuvent cet objectif doivent saluer. De la même manière, la responsabilisation grandissante des travailleurs de tous niveaux dans l’entreprise ne doit pas être vue d’abord comme une tentative vicieuse d’absorption totale de la personne humaine dans un travail marchand, mais en premier lieu comme une manifestation de l’avancée de l’esprit d’égalité démocratique dans le monde du travail et de l’entreprise, même si beaucoup reste encore à faire.

S’il est donc en effet préférable de chercher à élaborer de nouvelles règles adaptées aux réalités du XXIe siècle plutôt qu’à forcer tous les travailleurs et leurs employeurs à se soumettre au régime de l’emploi salarié, je ne suis pas certain qu’un « statut de l’actif » constitue un support adéquat pour fournir protection sociale et sécurisation de l’activité de travail. Tout en ayant le mérite de réduire les différences liées aux cadres légaux du travail, la notion d’actif peut poser deux problèmes potentiels :

- elle suggère que les droits sont conditionnés à l’exercice d’un travail (marchand ?). Quid des personnes en recherche d’emploi, en formation ou en « pause » pour raisons diverses (soins apportés à un enfant ou un aîné, congé sabbatique…) ? Il semble que dans notre société, la tendance à suivre des trajectoires de vie interrompues plutôt que des carrières professionnelles continues et rectilignes soit amenée à être de plus en plus fréquente – c’est au droit de s’y adapter et non l’inverse.

- ce caractère fragmenté se manifeste dans les périodes même de travail avec la multiplication d’emplois à temps partiel, de travail en mode projet et de tâches plus ou moins ponctuelles – des formes de « sous-emploi » certes pas toujours choisies, mais qui dans leur principe vont dans le sens d’un affranchissement à l’égard du temps de travail « contraint » au profit d’activités non marchandes mais non moins porteuses d’utilité sociale (soins prodigués à un enfant ou un aîné, bénévolat dans une association ou une coopérative, mandat politique local…). À partir de quel seuil d’heures travaillées dans la sphère marchande serait-on reconnu comme un actif ?

De mon point de vue, la tendance à l’universalisation des droits se poursuivra en raison de l’évolution des structures économiques et de la démographie, qui contraint la protection sociale à être de plus en plus financée par l’impôt plutôt que les cotisations sociales. C’est aussi le moyen le plus sécurisant pour les personnes de s’adapter aux mutations technologiques rapides, de changer d’employeur, voire de région géographique sans risquer une perte de droits et de protection sociale.

Si ces arguments plaident donc en faveur d’un rattachement d’une majorité des droits sociaux à la citoyenneté ou la résidence de longue durée, la notion d’activité – plutôt que celle d’actif – demeure néanmoins pertinente comme base de prélèvements obligatoires. Si l’on admet que les droits sociaux ont vocation à devenir de plus en plus universels et qu’ils ne pourront être financés de façon satisfaisante que par l’impôt, alors il serait possible de simplifier grandement le système des prélèvements obligatoires en fusionnant, d’une part, impôt sur les revenus du travail et les bénéfices non commerciaux et, d’autre part, cotisations sociales pour ne conserver qu’un impôt unique sur l’activité. Cela aplanirait en outre la distinction de moins en moins nette entre travail et service, compte tenu du contenu de plus en plus « créatif » des emplois et à l’inverse, de la situation de sous-traitance dans laquelle se trouvent dans les faits de nombreux « indépendants ».

En dehors des associations citoyenneté-droits sociaux et activité-impôt reste la question du pouvoir du travailleur dans l’entreprise. Ceci relève de mon point de vue non pas tant d’un éventuel nouveau statut de l’actif que d’une redéfinition du mode de gouvernance des entreprises qui accorderait toute sa place aux parties prenantes plus ou moins impactées par l’activité de l’entreprise : les travailleurs, bien sûr (y compris les personnels juridiquement externalisés), mais aussi les consommateurs et usagers, les riverains… Sans que cela ne remette en cause la propriété juridique des actionnaires sur le patrimoine de l’entreprise, la manière de s’en servir doit, eu égard aux effets occasionnés sur l’environnement et les personnes au-delà même des seuls salariés, pouvoir non seulement être encadrée par la norme, mais aussi consultée, voire co-décidée avec ces parties « intéressées ».

 

3) le desserrement du lien entre travail et protection sociale, maintien des revenus compris, permettrait aux syndicats d’être moins crispés sur la défense des emplois existants pour prendre en compte d’autres paramètres tels que la pénibilité et les possibilités d’automatisation.

Si l’on peut a priori supposer que tout emploi existant a une valeur sociale, sans quoi il serait difficile de convaincre d’autres personnes de lui attribuer une rémunération, il n’en résulte pas que la fonction de cet emploi ne peut pas être remplie de manière plus économe en travail et/ou de façon moins pénible pour le travailleur sans perte de valeur pour la société.

Ainsi, la mécanisation puis la robotisation dans l’industrie ont certes réduit le nombre de travailleurs nécessaires à la production d’un volume donné, mais outre que cela ne détériore pas forcément la qualité des produits pour les consommateurs, la diminution des besoins en travail à la chaîne n’est sans doute pas non plus à regretter, à condition bien sûr que les ouvriers auparavant assignés à ces tâches puissent accéder à des métiers moins pénibles, plus épanouissants et pas moins bien rémunérés.

Parmi les activités qui se sont révélées « essentielles » pendant la pandémie, on peut distinguer notamment deux catégories : celles dont la dimension humaine participe de leur valeur et est à ce titre difficilement remplaçable (personnel de santé, enseignants…) et celles qui sont vitales au bon fonctionnement de la société contemporaine mais qui pourraient dans une certaine proportion être automatisées sans perte de valeur (caissiers de magasin, chauffeurs routiers, livreurs, ouvriers de production).

Si la pandémie de Covid-19 a également rappelé que les maladies infectieuses recelaient toujours un grand potentiel de destruction, nous devons malgré tout garder à l’esprit que depuis le XIXe siècle, l’essentiel de l’amélioration de l’espérance et des conditions de vie ne provient pas de meilleurs traitements médicaux, mais d’améliorations ayant trait à l’alimentation, l’hygiène, l’urbanisme, au logement et bien sûr, au travail. Il n’est d’ailleurs pas anodin que le premier ministère de la Santé, qui remonte en France aux années 1920, s’appelait en réalité le ministère de l’Hygiène et que cette compétence était auparavant rattachée… au ministère du Travail.

Le progrès social entendu au sens large ne peut donc se limiter à la défense des emplois existants et doit dans certains cas soutenir les efforts d’automatisation et de changement des méthodes de travail pour améliorer les conditions de vie des personnes, même si cela peut impliquer une réduction du nombre d’emplois. Concrètement, la promotion des techniques de préfabrication dans la construction peut grandement diminuer les risques d’accident de travail dans le secteur et améliorer à la fois les conditions de travail et l’espérance de vie des professionnels. Dans le domaine du transport, l’automatisation pourra éviter à des millions de chauffeurs en Europe de sacrifier santé et vie de famille sur les routes tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre grâce à une conduite plus efficace. Dans l’agriculture, l’abandon progressif d’un modèle productiviste dopé aux intrants améliorera non seulement la qualité de l’eau et des sols, mais diminuera aussi les risques de maladie chez les agriculteurs et les riverains des épandages.

Ces derniers exemples, qui lient santé humaine et environnement dans l’approche intégrée « One Health », montrent aussi que conformément aux théories du risque exprimées dans les années 1990 par des penseurs comme Ulrich Beck et Anthony Giddens, la complexité de nos sociétés modernes est devenue telle que les risques qui s’y présentent, très diffus, peuvent difficilement être imputés à une source unique. Bien que cela n’exonère pas les entreprises de toute responsabilité dans la gestion de ces risques, cela devrait nous inciter à en socialiser une plus grande part, comme nous l’avons fait pour les risques sociaux au milieu du XXe siècle. Les actions d’hygiène et de sécurité au travail pourraient ainsi être fondues dans des politiques plus vastes de santé et d’environnement qui ignoreraient des frontières devenues pour partie obsolètes entre santé au travail et santé en général. Elles ne se contenteraient plus d’améliorer à la marge les conditions de travail mais pourraient, là où cela est possible et souhaitable, œuvrer à la substitution même des emplois pénibles et/ou dangereux tandis que dans le même temps, elles s’étendraient aux aspects environnementaux avec l’appui des services administratifs compétents.

- Romain Su -


Relance écologique

 

Je pense qu'une étude sur les métiers et les compétences nécessaires pour une relance sur de nouveaux métiers permettant de lutter contre le réchauffement climatique. 

Mettre des milliards dans ce domaine c'est profiter de la crise sanitaire pour en éviter d'autres 

Je suis prêt à travers des forums à contribuer à cette réflexion 

- Jean MAS -


Coopérer pour faciliter les transitions

 

La reprise des emplois doit s'appuyer sur l'exemple des travailleurs qui ont spontanément mis en commun des savoir, savoir-faire et moyens pour innover dans la fabrication des supports de protection au Covid et de l'aide aux personnes

Des barrières diverses organisationnelles ont été levées tout en se respectant et composant avec les intérêts économiques des coopérants.

Les territoires se sont dotés de plan climat air énergie territoriaux (pcaet) qui doivent accentuer la transition énergétique et écologique en soutenant les économies locales allant dans ce sens

Pour une mise en œuvre de ces coopérations le dispositif pôles territoriaux de coopération économique (ptce) doit être relancé et amplifié

La cfdt a toute légitimité pour réclamer et co-construire ces PTCE et en amont recenser dans les entreprises les idées et savoir-faire déjà en œuvre pour prouver que cette démarche est réaliste. Une partie de soutiens financiers des pouvoirs publics à l'emploi devrait être priorisée sur ceux émergeant de ces coopérations.

- André DESRUELLES -

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