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Temps partiel : Répartition des horaires et délai de prévenance

Publié le 23/11/2016

Lorsque l’employeur envisage de modifier la répartition des horaires de travail d’un salarié à temps partiel, il doit respecter un délai de prévenance. En revanche, ce délai ne s’applique pas si la modification intervient avec l’accord exprès du salarié. C’est la précision qu'apporte la Cour de cassation. Cass.soc. 09.11.16, n°15-19401.

La loi Travail du 8 août 2016 a opéré une réécriture complète de la partie du Code du travail portant sur la durée du travail, les repos et les congés. L’ensemble de ces articles ont donc fait l’objet d’une nouvelle numérotation. 

  • Faits, procédure

Embauché par une association dans le cadre de plusieurs CDD, le salarié signe finalement  un CDI à temps partiel. Depuis, son contrat a fait l’objet de plusieurs avenants (huit) en vue, pour chacun d’eux,  d’augmenter temporairement sa durée de travail.

Quelques mois plus tard, le salarié prend acte de la rupture de son contrat et saisit la justice. Il reproche entre autre à son employeur de ne pas avoir respecté la législation relative au temps partiel et plus particulièrement  le délai de prévenance prévu à  l’ancien article L. 3123-21 du Code de travail applicable à l’époque. En effet, aux termes de ce texte, lorsque l’employeur envisage de modifier de modifier la répartition des horaires d’un salarié à temps partiel, il doit l'informer au moins 7 jours à l’avance. Or en l’espèce, le salarié ne s’est à aucun moment vu notifier le changement.
Il réclame donc à ce titre la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps plein.

Les juges du fond déboutent le salarié. Pour eux, le délai de prévenance a vocation à s’appliquer en cas de modification de la répartition de la durée du travail d’un salarié à temps partiel. Or, ce n’est pas tout à fait le cas en l’espèce, puisque le salarié ne s’est vu notifier aucune modification de la répartition de ses horaires, mais a simplement signé des avenants en vue d’augmenter  temporairement sa durée de travail. Le délai de prévenance n’a donc pas lieu de s’appliquer dans le cadre d’avenants successifs.

Pour le salarié, la cour d’appel ajoute une condition aux dispositions légales. Il décide donc de saisir la Cour de cassation, qui va malheureusement approuver la solution dégagée par la cour d'appel. 

  • L’obligation de respecter un délai de prévenance

Pour  être valable, un contrat de travail à temps partiel doit être établi par écrit et comporter des  mentions obligatoires. Parmi elles figurent la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois tandis qu’une autre fixe les cas dans lesquels une modificationde cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification (1).L’ancien article L. 3123-21 du Code du travail ajoute que « toute modification de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois est notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu ». Etant bien entendu que cette modification ne peut intervenir que dans l’un des cas prévus au contrat de travail.

Le salarié considère que dans la mesure où l’augmentation de la durée du travail prévue par avenant a inévitablement eu pour effet de modifier la répartition de sa durée de travail, l’employeur aurait dû respecter le délai de prévenance de 7 jours.

La question est donc de savoir si ce délai s’applique dans l’hypothèse d’un avenant au contrat augmentant temporairement la durée du travail ? Non, répond la Cour de cassation :
« le délai de prévenance n’est applicable qu’en cas de décision unilatérale de l’employeur - et non lorsque la modification intervient avec l’accord exprès du salarié ».

  • Une interprétation restrictive de l'obligation légale

Dans un premier temps, la Haute Cour rappelle les termes de l’ancien article L. 3123-21 du Code du travail selon lequel toute modification doit être notifiée au salarié au moins 7 jours à l’avance. Considérant ensuite que la notion de « notification au salarié » implique que la modification ait été imposée par l’employeur, elle en déduit logiquement que ce délai n’a vocation à s’appliquer que lorsque la modification émane d’une décision unilatérale de l’employeur.
Ce qui n’est pas le cas en l’espèce, puisque la modification de la répartition de la durée du travail, résulte non pas d’une décision prise par l’employeur seul, mais de l’accord exprès du salarié, matérialisé par un avenant, d’augmenter son temps de travail.

La Cour de cassation fait sans conteste une interprétation littérale mais restrictive des dispositions légales. Au vu de la solution dégagée par cet arrêt, le délai de prévenance exigé en cas de changement dans la répartition de la durée de travail d’un salarié à temps partiel, n’aurait donc vocation à s’appliquer que dans un seul cas : lorsque l’employeur décide unilatéralement de modifier cette répartition dans l’un des cas prévus au contrat de travail.
En revanche, dès lors que la modification résulte d’un commun accord des parties, ce qui est le cas dans le cadre d’avenant augmentant la durée du travail, le délai n’aurait pas lieu de s’appliquer.  

Cette solution se comprend aisément lorsque l’avenant au contrat précise la nouvelle répartition de la durée du travail. Dans cette hypothèse, le salarié, en acceptant l’augmentation de sa durée de travail, accepte par la même occasion la nouvelle répartition de cette durée dont il a connaissance. Or, la mention de cette nouvelle répartition de la durée du travail à l'avenant augmentant la durée, n’est pas expressément exigée par la loi (2). La décision dégagée ici se justifie moins, car si le salarié accepte d’augmenter sa durée de travail, accepte-t-il pour autant la nouvelle répartition qui en est faite ?

La loi Travail n’a pas véritablement modifié les règles applicables en la matière. Elle donne toutefois priorité à l’accord d’entreprise ou d’établissement sur l’accord de branche quant à la détermination du délai de prévenance, dans la limite inférieure de 3 jours ouvrés. Ce n’est qu’à défaut d’accord collectif, que le délai de 7 jours ouvrés recouvre application (Articles L.3123-24 et L.3123-31 C.trav).



(1) Ancien art L.3123-14 C.trav.

(2) Ancien art L.3123-14 C.trav. : « l’avenant au contrat de travail prévu à l’article L.3123-25 mentionne les modalités selon lesquelles des compléments d’heures peuvent être accomplis au-delà de la durée fixée par le contrat ».