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Horaires de travail: modulation et accord du salarié

Publié le 29/10/2013

La loi du 22 mars 2012 (dite loi Warsmann) a renversé l’état du droit concernant la modulation du temps de travail, en faisant primer l’accord collectif sur l’accord individuel. Cette modification du droit a une histoire, Le Point sur revient sur sa génèse et son régime.

Il s’agit en réalité d’une réponse du législateur à la Cour de cassation. En effet, avant la loi Warsmann, la Haute juridiction avait décidé que la mise en œuvre d’un accord de modulation est subordonnée à l’accord individuel des salariés : « l’instauration d’une modulation du temps de travail constitue une modification du contrat de travail qui requiert l’accord exprès du salarié». Décision prise en l’absence de disposition législative expresse sur la question, mais s’inscrivant parfaitement dans sa jurisprudence sur les changements d’horaires, selon laquelle, pour le dire vite, tout changement ayant des effets importants sur la vie personnelle est une modification du contrat (ex. passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit, du travail la semaine au travail du dimanche, etc.).

La mise en place d’une modulation des horaires par accord collectif

Issu de la loi du 22 mars 2012, l’article L3122-6 du Code du travail[1] prévoit que, désormais, l’accord individuel des salariés concernés n’est plus nécessaire pour mettre en œuvre un accord collectif modifiant la répartition du temps de travail (sur la semaine, le mois ou l’année). En résumé, mis à part les salariés à temps partiel, auxquels cet article ne s’applique pas, les salariés ne pourront plus refuser une modification de la répartition de leurs horaires en application d’un accord collectif.

Toutefois, ce texte ne permet pas d’imposer une modulation aux salariés dans tous les cas.

Les limites de la loi

Une validation constitutionnelle ambigüe-Le Conseil constitutionnel[2] a validé la loi en estimant que l’atteinte à la liberté contractuelle (des salariés) était justifiée par un motif d’intérêt général suffisant (l’adaptation des entreprises…), dès lors qu’il y avait un accord collectif. Selon les neuf sages, l’accord collectif permet d’offrir des garanties suffisantes aux salariés.

En revanche, et a contrario, en cas d’instauration unilatérale d’un système de modulation du temps de travail par l’employeur, c’est-à-dire à défaut d’accord collectif, l’accord du salarié reste nécessaire…

L’employeur peut en effet mettre en place une modulation en l’absence d’accord collectif, en application de l’article D3122-7-1 du Code du travail. Une telle répartition est alors limitée à un cycle de 4 semaines (au lieu d’un an lorsqu’il y a un accord). En outre,la consultation des IRP et le respect d’un délai de prévenance des salariés de 7 jours sont requis. Et, on l’a dit, l’accord du salarié est nécessaire lors du passage d’un système d’horaires classique à un système de modulation des horaires.

 Une loi d’application immédiate et non rétroactive selon la Cour de cassation

Dans unarrêt du 25 septembre 2013[3], (lire dans Le Fil d'actu) la Cour de cassation a dénié à l’article 45 de ladite loi tout caractère interprétatif. Dès lors, concernant toutes les mises en œuvre d’accords de modulation antérieures à l’entrée en vigueur de la loi du 22 mars 2012, sa jurisprudence antérieure reste d’actualité : l’accord préalable du salarié est nécessaire.

[1] « La mise en place d’une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année prévue par accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail.

Le premier alinéa ne s’applique pas aux salariés à temps partiel ».

[2] Décision du 15 mars 2012 n°2012-649 DC.

[3] Cass. soc.25.09.13, P nV12-17776 et 12-17777, cf. fil d’actualité.