"Conférence environnementale : nous n'avons pas le droit à l'erreur"

Il faut absolument réussir la conférence environnementale pour la transition écologique. Après la conférence sociale, il faut aborder le temps long de l’environnement, qui est une des composantes pour nous sortir de la crise. A ce titre, la transition énergétique et plus largement la transition écologique est essentielle.
Depuis plus de cinq ans, le monde est soumis à des turbulences économiques qui menacent les équilibres. Ces turbulences, déclenchées par une crise financière, montrent les impasses des réformes du système bancaire et financier depuis trente ans. Les crises financières et économiques masquent les autres menaces bien réelles sur le monde.
Le dérèglement climatique, la perte de biodiversité, la hausse du coût des matières premières, le chômage, les compétitivités hors coûts sont des indicateurs passés au rouge. La gouvernance mondiale piétine.
En regardant avec lucidité la situation actuelle, nous pouvons affirmer que les inégalités environnementales vont de pair avec les inégalités sociales. Il faut donc construire un nouveau modèle de développement qui soit économe en ressources naturelles et vivantes, respectueux de l’environnement en réduisant son empreinte écologique, et qu’il garantisse la justice sociale tout en créant de la richesse. Ceci est primordial si nous voulons transmettre un monde vivable aux futures générations plutôt que l’angoisse de résorber les dettes (économiques et écologiques !) contractées par leurs aînés.
C’est bien la notion de temps qui est au centre de la prochaine conférence. Il faut décliner les temporalités sur les pôles du développement soutenable. L’urgence aujourd’hui est la sauvegarde et l’amélioration des orientations sociale et écologique de l’Europe, et partant de la sauvegarde de l’euro, dans une rénovation de sa gouvernance. On ne doit pas céder au pessimisme ambiant. L’impuissance dans ce domaine marquerait le début d’une régression majeure.
L’Europe doit retrouver son esprit initial, celui de la solidarité, de la combativité et surtout démontrer qu’elle a construit un modèle social et environnemental exemplaire, porteur d’espoir en l’avenir et que tout ceci fait partie de son identité et doit lui permettre de retrouver le chemin de la compétitivité, de l’emploi et d’une nouvelle croissance. Sa capacité unique, parmi les grandes régions du monde, à gérer le défi environnemental constitue certainement le point d’appui le plus solide pour construire ce nouveau modèle de société.
Cette prospective s’appuiera aussi sur les voies ouvertes par la conférence sociale. S’il n’y a pas des emplois d’avenir solides, des transitions professionnelles, une révision du régime des prélèvements obligatoires, la croissance soutenable sera incomprise. Le mot croissance peut inquiéter dans un univers dont les ressources deviennent rares, mais l’adaptation à un monde naturel sous tensions est en soi, par ses investissements colossaux, génératrice de croissance, mais une croissance qui ne sera plus destructrice. Il nous faut à l’occasion de la conférence construire des indicateurs de bien-être qui ne masquent pas les souffrances quotidiennes.
La conférence ne peut mettre de côté les acquis des Grenelles de l’environnement et de la mer, elle doit les faire fructifier pour trouver comme pour le Grenelle 1 un compromis national.
On peut admettre la réduction de l’énergie nucléaire dans notre mix énergétique, mais sans la sécurisation des parcours des salariés, nous allons au conflit. Le défi est de développer l’emploi par l’amélioration de l’environnement, non de s’enfermer dans le faux dilemme 'emploi OU environnement'.
La démocratie sera au centre de la conférence, il faut des expertises contradictoires et soumises à des critères scientifiques et de connaissance de la demande sociale, mais aussi des organisations en prise avec la société et qui s’engagent.
- Renforcer et financer la stratégie nationale pour la Biodiversité pour en faire au même titre que l'énergie et la lutte contre le réchauffement climatique, un axe central de recomposition de notre modèle de développement et du ménagement de nos territoires.
- Construire et lancer un important programme de réhabilitation thermique du bâti (réponse à la précarité énergétique comme au déficit de la balance des paiements) et d’investissement dans les infrastructures de transport et de production, économes en ressources voire productrice de 'plus environnementaux'.
- Etudier, avec des dispositifs d’expérimentation, l’économie de fonctionnalité qui économiserait les ressources naturelles et vivantes.
Nous avons du temps, mais peu de temps, pour remplacer la finance devenue folle par les acteurs d'un avenir solidaire et durable. Beaucoup de nos concitoyens attendent, la suite de notre nouvelle histoire de France, dans une Europe résolument optimiste.
Hélène Valade, présidente du Collège des directeurs du développement durable (C3D)