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Action juridique n° 246 : le numéro d’été est un « spécial télétravail » !

Publié le 15/06/2021

Pas moins de 15 ans après l’Ani de 2005, un nouvel Ani pour une mise en œuvre réussie du télétravail a été signé le 26 novembre 2020. La CFDT a été force de propositions tout au long de cette négociation, elle aussi à distance, et loin d’être gagnée d’avance. Entre les réticences du patronat et la frilosité du législateur, le sujet du télétravail avait bien besoin d’une consolidation de son cadre juridique et d’une adaptation aux besoins d’aujourd’hui. En près de 20 ans en effet, il n’avait pas fait l’objet de plus de trois articles au sein de notre Code du travail !

Une fois de plus, le dialogue social interprofessionnel et paritaire a démontré son efficacité pour remédier à une telle carence. AJ s’est attaché à retracer pour vous tout ce que vous aurez besoin de savoir sur ce dossier d’ici la rentrée.

Un démarrage timide et frileux, boosté par l’urgence sanitaire et ses mesures d’exception

Le diagnostic partagé sur le télétravail venait tout juste d’être approuvé par la quasi totalité des organisations patronales (OP) et syndicales (OS), lorsque le patronat a finalement accepté d’engager une négociation interprofessionnelle. Mais tout en prévenant : cet accord ne serait « ni normatif ni prescriptif », car selon lui, le cadre juridique existant suffisait.

Malgré ces réserves, les OS ont accueilli positivement l’ouverture des négociations, qui ont débuté le 3 novembre 2020 en plein reconfinement… Les partenaires sociaux sont tombés d’accord sur le fait de resserrer le calendrier des négociations, pour aboutir à une signature commune le 26 du même mois.

Même si en 2017 les règles avaient été assouplies et simplifiées, aujourd’hui encore, le télétravail  fait l’objet de trois rares articles au sein du Code, dont l’un d’eux sur son recours en situation exceptionnelle - ce qui avant la crise sanitaire actuelle n’était tout de même pas très fréquent ! Mais paradoxalement, c’est la mise en œuvre de cet article dont l’utilisation ne devait être que provisoire qui a propulsé le télétravail au rang d’organisation privilégiée du travail. En plongeant en une journée des millions de travailleurs dans une organisation de travail à distance, à domicile et à plein temps, la crise a permis d’introduire le télétravail là où il n’était souvent ni envisagé ni envisageable. Elle a en même temps révélé les limites de notre cadre juridique et les risques d’une mise en œuvre dans l’urgence, massive et surtout sans préparation des entreprises… Il y avait donc urgence à rénover et adapter ce cadre !

D’abord, parce que le télétravail est tout sauf un simple changement de lieu de travail ! En attestent ses impacts sur de nombreux aspects de la relation de travail, qu’ils soient individuels (temps et charge de travail, vie privée...) ou collectifs (organisation du travail, dialogue social, management...). En attestent également ses enjeux, tout aussi nombreux, tant pour les salariés que pour les employeurs, dépassant le cadre de l’entreprise (développement des territoires, environnement, mobilités...).

Ensuite, parce que si la crise a pu diviser les travailleurs, (ceux qui souhaitent télétravailler plus versus ceux qui ne souhaitent pas télétravailler trop), elle a mis tout le monde d’accord sur un point : la nécessité d’encadrer collectivement le télétravail pour mieux l’anticiper par la négociation collective de proximité.

Un accord utile pour affronter les enjeux multiples liés au développement du télétravail

C’est ce à quoi s’est attaché l’Ani sur le télétravail signé le 26 novembre 2020. Tirant les enseignements de la crise sanitaire, cet accord constitue un précieux support au dialogue social mené ou à mener dans les entreprises ainsi qu’un socle minimal de garanties aux salariés d’entreprises non couvertes conventionnellement.

Pour les négociateurs et les salariés, l’enjeu est de taille. Si le télétravail fait désormais partie intégrante de notre organisation du travail, notre engouement ne doit pas faire oublier les risques qu’il peut engendrer sur la santé et la sécurité des travailleurs et sur l’organisation future du travail sur site lorsqu’il s’accompagne d’une réorganisation des espaces professionnels…

Enfin, une généralisation du télétravail pourrait à terme réinterroger la notion de travail, voire de salariat, ce qui n’est pas anodin…

L’anticipation et la vigilance sont donc de mise !

 

Demandez le menu (avec ou sans titre restaurant) !

Sans prétendre être exhaustif, ce numéro d’AJ fait le point sur les règles entourant le télétravail et leur articulation au regard du nouvel Ani (qui n’est pas si « non normatif » que cela !).

Cela concerne la mise en place du télétravail dans l’entreprise avec un récapitulatif des évolutions du cadre juridique, les apports particuliers de ce dernier Ani, des conseils pratiques, un rappel des circonstances exceptionnelles et autres cas de force majeure…

Le point y est également fait sur les droits et obligations du télétravailleur, la conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle avec ce type d’organisation du travail, le droit à la déconnexion, les cas de prise en charge financière, les titres restaurant…

Du côté employeur : rappel des obligations en termes de conditions matérielles, de santé et de sécurité, évocation des risques spécifiques à ce type de travail, approche de la très délicate question du contrôle du travailleur par la donnée numérique…

Un tableau de synthèse sur le télétravail comme objet de négociation clôt le dossier pour achever d’équiper les militants face à ces enjeux.

Quant à notre rubrique « le Coin du militant prud’homme » elle s’inscrit dans la continuité thématique de ce numéro, puisqu’elle recense les points juridiques laissés encore en suspens concernant le télétravail, les incertitudes alimentant encore des risques de contentieux…

Voilà de quoi, nous l’espérons, être mieux armés face à ces changements conséquents, qui peuvent aller jusqu’à interroger la notion même de travail telle que nous la connaissions jusqu’ici… bref, pour préparer avec responsabilité « le monde d’après »…

 

Toute l’équipe de la rédaction d’Action juridique vous souhaite un très bel été, plus léger et insouciant que les mois difficiles que nous venons de traverser !

Numéro de rentrée : le numéro 247 d’AJ portera sur le licenciement pour inaptitude.