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Temps de travail : vacances ou voyage d’affaires ?

Publié le 23/02/2016

Un voyage d’accompagnement de clients peut-il être considéré comme du temps de travail effectif ? Non, répond la Cour de cassation, dès lors qu’il n’est pas obligatoire, que le salarié ne s’est vu confier aucune mission particulière d’encadrement et qu’il pouvait vaquer librement à des occupations personnelles. Cass.soc.10.02.2016, n° 14-14213.

  • Les faits

Dans le cadre de challenges, la société offre chaque année à ses salariés des voyages à l’étranger. Ces voyages sont dits « d’accompagnements commerciaux » car le salarié est alors amené à « participer à des activités de loisirs communes organisées avec les clients de l’entreprise pour renforcer les liens déjà noués avec eux ». 
C’est ici que réside le litige : le salarié estime qu’en participant à ces activités, il agit pour le compte de sa société. En conséquence, bien que décomptés de ses congés payés, ces temps constituent en réalité un temps de travail effectif. 
Il saisit donc la justice d’une demande de rappels de salaire et produit à cette fin diverses attestations de clients précisant que ce dernier les accompagnait lors d’activités, de repas ou d’excursions…

La cour d’appel ne va pourtant pas voir les choses ainsi. Elle considère que le salarié n’apporte pas la preuve qu’il s’est vu confier des missions particulières d’encadrement ou de prise en charge des clients. Il ne prouve pas plus qu’il ne disposait pas de temps libre. En conséquence, les temps litigieux ne pouvaient être, même partiellement, considérés comme du temps de travail effectif. La cour déboute le salarié de sa demande. Celui-ci forme un pourvoi en cassation.

  • Du temps de travail effectif…

Constitue un temps de travail effectif, au sens de l’article L. 3121-1 du Code du travail, le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

C’est sur cette définition que s’appuie le salarié pour faire qualifier ces journées de voyages en temps de travail effectif. Dans la mesure où il devait, durant ces périodes, participer à des activités de loisirs communes organisées avec les clients de l’entreprise dans le but de « renforcer les liens », il se trouvait en réalité à la disposition de son employeur.

La Cour de cassation avait déjà pu juger, il y a quelques années, que les temps passés par une salariée à des soirées organisées par son entreprise étaient considérés comme du temps de travail effectif, quand bien même la salariée y disposait d’une certaine liberté de mouvement (1). En l’espèce, non seulement l’employeur imposait à la salariée de participer à ces apéritifs dînatoires mais il lui confiait en outre des attributions bien précises.

  • .... Pas caractérisé en l’espèce

Les juges du fond, suivis par la Cour de cassation, ont au contraire estimé que les critères permettant de caractériser un temps de travail effectif n’étaient pas réunis. Après avoir constaté que le salarié n’avait aucune obligation de participer à ces voyages (les jours étaient décomptés des congés payés avec demande écrite du salarié), ils considèrent :

- qu’en dehors des activités communes auxquelles il participait, le salarié n’apporte pas la preuve qu’il était tenu de rester à la disposition de son employeur ou de se conformer à ses directives. Finalement, aucune mission particulière d’encadrement ne lui était demandée.

- qu’Il n’établit pas plus que les tâches accomplies ne lui permettaient pas de disposer de temps libre. Pour résumer, il pouvait durant ces temps vaquer à ses occupations personnelles sans se trouver à la disposition de son employeur.

Si cette solution ne paraît en l’espèce pas surprenante, il n’en reste pas moins que le fait d’être ou non à la disposition de son employeur et de se conformer à ses directives n'est pas un critère toujours aisé à définir. Comment aurait été perçu le fait pour le salarié de refuser de participer aux activités communes avec les clients de son entreprise ?


(1) Cass.soc. 5 mai 2010, n° 08-44895.