Retour

Harcèlement moral : réintégration rapide en cas de licenciement !

Publié le 06/01/2016

Lorsqu’il est saisi d’une demande visant à faire constater la nullité du licenciement pour dénonciation de faits de harcèlement, le juge des référés peut se prononcer sur la bonne foi du salarié et le cas échéant, ordonner sa réintégration dans l’entreprise. Cass.soc.25.11.2015, n° 14-17551.

Le salarié qui dénonce, témoigne ou relate des faits de harcèlement moral ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte(1). Toute sanction prise à l’encontre de ce salarié serait nulle(2)Cependant, pour bénéficier de cette protection, le salarié doit être de bonne foi(3). A défaut, il pourra être valablement sanctionné. La mauvaise foi ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce(4).

Dans les faits, une salariée avait été licenciée pour faute consécutivement à la dénonciation des faits de harcèlement moral qu’elle avait subis. Elle avait alors saisi le conseil de prud’hommes, en formation de référé, pour faire juger son licenciement nul et faire ordonner sa réintégration.

 

  • Une compétence délimitée du juge des référés

Le juge prud’homal des référés n’est compétent que pour connaitre des situations d’urgence afin deprévenir un dommage imminent, de faire cesser un trouble manifestement illicite(5) ou de faire respecter une  obligation qui n’est pas sérieusement contestable(6).

Dans cette affaire, la salariée soutenait que son licenciement constituait un trouble manifestement illicite en ce qu’il était la conséquence directe de la dénonciation des faits de harcèlement moral à son encontre. Il était donc nul.

La Cour d’appel a rejeté la demande de la salariée. Elle a retenu qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la bonne ou mauvaise foi de la salariée, cette appréciation relevant de la compétence des juges du fond. Partant, elle a jugé que le trouble manifestement illicite n’était pas caractérisé.

 

  • Une première : le "juge de l'urgence" peut apprécier la bonne foi du salarié

La chambre sociale a cassé l’arrêt d’appel et a affirmé : « Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de se prononcer, comme il le lui était demandé, sur la mauvaise foi de la salariée lorsqu'elle avait dénoncé les faits de harcèlement moral, pour déterminer si son licenciement constituait un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé [l’article R. 1455-6 du Code du travail] ».

Ainsi, pour la première fois, la Cour de cassation affirme dans son arrêt du 25 novembre que le juge des référés peut et doit apprécier la bonne ou mauvaise foi du salarié afin de déterminer si un licenciement constitue un trouble manifestement illicite.

Cet arrêt ouvre la porte à une action en référé du salarié qui est licencié suite à une dénonciation de harcèlement moral pour faire annuler son licenciement. L’intérêt est que le salarié pourra obtenir rapidement une réintégration dans l’entreprise.

Néanmoins, en pratique, la réintégration dans un tel cas sera compliquée pour le salarié qui devra revenir dans une entreprise où il a été victime de harcèlement.


(1) Art. L. 1152-2 C. trav.

(2) Art. L. 1152-3 C. trav.

(3) Cass. soc. 07.02.2012, n° 10-18035

(4) Cass. soc. 10.03.2009, n° 07-44092 ; Cass. soc. 10.06.2015, n° 13-25554

(5) Art. R. 1455-6 C. trav.

(6) Art. R. 1455-7 C. trav.