Le succès en bout de ligne de la CFDT chez PSA Rennes abonné

Menacée de fermeture il y a cinq ans, l’usine automobile bretonne tourne aujourd’hui à plein régime. L’investissement de la section CFDT pour assurer l’avenir du site et de ses salariés a été largement récompensé aux dernières élections professionnelles.

Par Anne-Sophie Balle— Publié le 05/02/2019 à 14h26

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Leur regard en dit long. Le sourire aux lèvres, les militants savourent leur victoire. Celle de leur organisation, devenue en septembre dernier la première force syndicale de PSA Rennes, mais aussi celle d’une renaissance industrielle locale. « Beaucoup nous ont vus morts en 2012 », concède Laurent Valy, le secrétaire de section de l’usine. En pleine crise de l’automobile, la direction de PSA annonce un plan social, avec à la clé 1 400 suppressions de postes, soit près d’un quart de l’effectif. La CFDT, implantée depuis peu à La Janais, ne pèse que 7 % mais bénéficie du soutien de l’interpro et capte rapidement l’attention des médias. « Nous avons eu beaucoup de réunions tripartites et de travaux en commissions autour de la réindustrialisation du site. Et, à chaque fois, nous étions là, face caméra, pour alerter l’opinion publique sur l’enjeu de sauver le site mais aussi de défendre une filière automobile en Bretagne… »


Les salariés-relais, tremplin pour la section
Depuis 2011, une cinquantaine de salariés reconnus dans leur milieu professionnel acceptent de porter le badge CFDT. Ils répondent aux questions des salariés et font remonter les informations aux élus. « C’est une force supplémentaire et une marque de visibilité extraordinaire », note Laurent Valy.

Rupture conventionnelle collective
En janvier 2018, PSA a signé un accord de rupture conventionnelle collective avec cinq syndicats (78 %). Le groupe anticipe 1 300 départs volontaires en 2018, auxquels s’ajoutent 900 congés seniors. Dans le même temps, l’accord prévoit l’embauche de 1 400 CDI et 2 000 apprentis. Pour la DSC CFDT Christine Virassamy, « ce n’est que la continuité des mesures en vigueur chez PSA, elle offre un cadre juridique. Nous avons sécurisé l’accord afin qu’il ne soit pas dangereux mais une opportunité pour les salariés qui le désirent ».

Expérimentation QVT
Après une vaste enquête en 2016, la CFDT a souhaité mettre en place des lieux d’expression à La Janais. « Plusieurs problèmes avaient été identifiés au montage, un secteur excentré du flux principal de production et plus facile à arrêter pour permettre aux salariés de trouver des solutions sans perturber tout le monde. Ce choix n’a pas été privilégié par la direction, qui a préféré créer son propre modèle, “Best”, dans des secteurs plus visibles mais sans réels problèmes… sans succès », note la section. Aujourd’hui, la CFDT veut relancer son projet.

En 2013, la direction présente un accord compétitivité emploi comprenant beaucoup de sacrifices (gel des salaires, suppression des primes, flexibilité…) et peu de garanties quant au maintien de l’emploi. La CFDT, qui ne s’y retrouve pas en volumes de production, refuse de signer. « À peine 150 000 véhicules étaient prévus pour Rennes, alors qu’il en aurait fallu 180 000 au minimum afin d’assurer l’avenir du site de manière pérenne. »

Obtenir de vraies garanties

Une vision confirmée puisqu’en 2016 la direction proposera un nouvel accord de compétitivité propre au site rennais, le « Contrat d’avenir pour Rennes », signé cette fois par l’ensemble des organisations syndicales, exception faite de la CGT. Moyennant un gel des salaires pendant trois ans (de 2017 à 2019), la direction injecte 110 millions d’euros dans la modernisation de la chaîne de production de l’entreprise, devenue surdimensionnée eu égard aux volumes traités. Surtout, la CFDT obtient l’attribution d’un nouveau véhicule, dont la production était initialement prévue en Chine, le C5 Aircross, qui vient s’ajouter à la production du Grand SUV 5008 lancée en 2016. « Il a fallu faire preuve de pédagogie, notamment sur le gel des salaires. Mais les salariés, éprouvés par la multiplication des jours de chômage partiel des dernières années, ont rapidement compris l’enjeu », soutient Laurent Valy.

Le revirement est spectaculaire. Dès 2017, l’entreprise embauche 1 000 intérimaires, les volumes de production grimpent avec, à la clé, des heures supplémentaires payées. « On a réussi à inverser la tendance, et une centaine de CDI intérimaires ont pu être embauchés », se réjouit Pascal Marquet, élu au comité social et économique (CSE). Pour répondre à la demande du nouveau C5 Aircross, très prisé à l’étranger, une quatrième équipe, qui sera opérationnelle au début décembre les vendredis, samedis et dimanches, va venir compléter les trois équipes qui travaillent en trois-huit la semaine. « Pour cette nouvelle équipe, nous recrutons 350 opérateurs et 1 000 intérimaires. Actuellement, on embauche une quarantaine de personnes chaque jour. On cherche du monde ! », abonde Laurent Valy. De quoi regarder l’avenir sereinement. Le point d’orgue de cette renaissance est arrivé en septembre dernier, avec les élections CSE : la CFDT devient première organisation syndicale sur le site avec 36 % des voix et 9 élus…

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