États-Unis : Une croissance inégalée, des inégalités croissantes  abonné

Les États-Unis connaissent une période favorable. L’économie et l’emploi se portent bien, mais les inégalités continuent de se creuser, comme le confirment la politologue Nicole Bacharan 1 et l’historien Jean-Christian Vinel 2, deux spécialistes des États-Unis.

Par La rédaction— Publié le 31/10/2018 à 14h04

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« N’imputons pas au seul Donald Trump la meilleure santé de l’économie américaine, commence Jean-Christian Vinel. Entre 2008 et 2016, Barack Obama et les démocrates ont mis en place des politiques économiques et sociales dont Trump récolte les fruits. »

Cette mise au point faite, Nicole Bacharan précise : « Le taux de chômage est officiellement de 3,7%, mais si l’on prend en compte toutes les catégories, le taux réel est proche de 7,6 %. D’ailleurs, la population active reste stable tandis que la population totale augmente. » Pour Jean-Christian Vinel, « le nombre de travailleurs pauvres est resté constant entre 2007 et 2016, ainsi que le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, soit plus de 43  millions d’habitants. »

« Les inégalités sont accentuées par des salaires qui peinent à augmenter, soutient Nicole Bacharan. Le salaire fédéral minimum n’est que de 7,25 dollars. Heureusement, des entreprises mais aussi des villes et des États imposent des salaires minima plus élevés, ce qui a un effet d’entraînement. Par ailleurs, les baisses d’impôt (de 35 à 21%) profitent essentiellement aux entreprises et beaucoup aux plus riches. Un quart de ces baisses bénéficient à 1% des contribuables les plus riches et les deux tiers aux 20% les plus riches. La petite classe moyenne y gagne peu. » Pour la politologue, « ces baisses font grimper les déficits qui menacent à l’avenir les retraites et les assurances médicales. De plus, si une crise intervenait, l’État n’aurait aucune marge de manœuvre ».

Violentes attaques antisyndicales

De son côté, Jean-Christian Vinel établit une corrélation entre la courbe des inégalités et le nombre des adhérents des syndicats. « Les inégalités ont décliné entre les années 40 et 70 tandis que les effectifs syndicaux augmentaient. Ces derniers ont atteint jusqu’à 35% de la population active. Aujourd’hui, les adhérents ne représentent plus que 6% des salariés dans l’industrie. La part
des salariés syndiqués reste élevée dans le public mais le syndicalisme doit y faire face à de violentes remises en cause. 
»

Depuis 2011, et une décision de l’État du Wisconsin de priver les syndicats de financement, les attaques antisyndicales font rage. En témoignent le dernier décret présidentiel limitant les droits des syndicats dans l’administration fédérale (lire ci-dessous) et le décret de la Cour suprême du mois de juin mettant fin aux règles de financement des syndicats. Celles-ci obligeaient tous les salariés d’une entreprise à cotiser au syndicat dès lors qu’il avait remporté plus de 50 % des voix. Ces décisions juridiques vont plomber, et pour longtemps, l’activité syndicale. Seules alternatives, selon Jean-Christian Vinel : « Résister, dans un premier temps, et…

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