Extrait du magazine n°467
Dans l’Oise, les agents du centre hospitalier intercommunal Compiègne Noyon (CHICN) ont été les premiers à faire faceà l’épidémie et à un afflux massif de patients. Un traumatisme pour beaucoup d’entre eux. Epuisés et anxieux, ils redoutent la « seconde vague ».
Légende (©photo Michel Lemoine) : L’équipe de Compiègne (de g. à dr.) : Laure, aide-soignante ; Anaïs, infirmière ; Sabrina Barré, aide-soignante ; Catherine Ponnou-Delaffon, secrétaire de la section CFDT, et Catherine, aide-soignante.
« Est-ce que ma vie vaut 1 300 euros par mois ? Pourquoi je ne peux pas profiter pleinement de ma famille ? Est-ce que je dois sacrifier mon temps libre ? » Ces interrogations des personnels soignants, la section CFDT du CHICN les entend de plus en plus fréquemment.
La « première vague » de patients atteints par le coronavirus a laissé des traces indélébiles. Alors, quand ils observent l’évolution de la situation sanitaire et le frémissement à la hausse des courbes dans les Hauts-de-France, ils s’inquiètent, alertent l’opinion publique et s’interrogent sur leur avenir. « À la différence d’il y a huit mois, nous savons ce qui nous attend. Et nous ne sommes pas prêts à revivre ça, insiste Catherine Ponnou-Delaffon, secrétaire de la section CFDT du CHICN.
Depuis le 26 février dernier, date du premier cas de Covid-19 dans l’établissement, la tension n’est jamais redescendue chez les agents. L’angoisse de la maladie est présente dès l’admission d’un nouveau patient. « Nous avons l’impression d’être dans un tunnel qui n’en finit pas. » L’hôpital est devenu un « terrain de guerre », avec vingt lits de réanimation occupés de façon quasi permanente pendant de longues semaines, des patients transférés vers Paris ou Amiens et une chambre mortuaire débordée, au plus fort de la crise.
« Nous avons dû faire des choix…J’ai très mal vécu cette période. J’ai l’impression de ne pas avoir eu les moyens de faire correctement mon métier… »
La CFDT du CHICN a alerté la direction sur la détresse des agents, tant physique, que psychologique, qui vient s’ajouter à un manque chronique de personnels, lié à l’accroissement des arrêts de travail, pour cause de cas de Covid ou de suspicion. Pendant que les effectifs décroissent, les patients affluent.
Les repos des présents sautent, les horaires sont modifiés en permanence, le stress s’accumule. L’hôpital fonctionne à flux tendu. Lorsque les renforts arrivent, c’est à peine si les soignants présents s’en rendent compte. « Nous ne voyons aucune différence. Nous ne sommes, de toute façon, pas assez nombreux », insiste Catherine. Pour les agents, impossible donc de se reposer, encore moins d’être sereins. Ni au boulot ni à la maison. « J’ai peur d’embrasser mes…