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Vol dans l'entreprise : l’employeur est-il responsable ?

Publié le 08/04/2015 (mis à jour le 09/05/2018)

Le principe veut que le salarié qui est victime de vol d’un objet personnel (argent, carte bleue, téléphone portable,…) sur son lieu de travail, puisse se retourner contre son employeur. Mais l’employeur peut, dans certains cas, se libérer de sa responsabilité.

 

  • Le principe de la responsabilité de l’employeur

Lorsque les salariés sont tenus de porter une tenue de travail professionnelle, l’employeur doit mettre à leur disposition des vestiaires équipés d’armoires individuelles, munies d’une serrure ou d’un cadenas, afin d’y stocker leurs vêtements de ville pendant la durée du travail.

Dans ce cas, on considère que l’employeur est dépositaire des objets personnels du salarié au sens de l’article 1915 du Code civil (1). L’employeur doit ainsi conserver ces objets personnels avec la même attention qu’il aurait pour ses propres affaires, afin de les restituer en bon état (2).

En cas de détérioration ou disparition des objets confiés, s’il se trouve que l’employeur n’a pas tout mis en œuvre pour en assurer la garde et une restitution en bon état, sa responsabilité sera engagée.

C’est par exemple le cas de vol commis dans les vestiaires en l’absence de précaution prise par l’employeur malgré des vols répétés (3).

Le simple fait de ne pas pouvoir restituer les objets confiés est une violation de son obligation. L’employeur sera alors tenu de rembourser les objets volés.

  • Les cas où l’employeur pourra se dégager de sa responsabilité

- Soit complètement en démontrant la force majeure : L’employeur devra alors prouver que la disparition est due à une circonstance étrangère, imprévisible et insurmontable (4).

Soit en partie, si l’employeur prouve que le salarié a lui-même commis une imprudence, par exemple, lorsque ce dernier n’a pas verrouillé son armoire.

  • Les cas où l’employeur ne peut se dégager de sa responsabilité

L’employeur ne peut pas insérer dans le règlement intérieur une clause de non-responsabilité, c’est-à-dire une mention par laquelle il se dégage de toute responsabilité en cas de perte, vol, détérioration des effets, espèces ou objets de toute nature déposés dans les vestiaires et armoires individuelles (5).Cependant il peut le faire apparître dans une clause du contrat de travail ou par voie d'affichage dans l'entreprise.

Pour résumer, l’employeur doit tout mettre en œuvre (mise à disposition de vestiaires…) afin de conserver les objets personnels des salariés et les restituer en bon état. Il doit le faire comme s’il s’agissait de ses propres affaires personnelles. S’il ne le fait pas et que ces objets venaient à être détériorés ou volés, l’employeur engagerait sa responsabilité et serait tenu d’indemniser le salarié. L’employeur ne pourra alors se dégager de sa responsabilité qu’en invoquant la force majeure ou une négligence du salarié.

Si les conditions sont réunies le salarié pourra donc demander à l’employeur de dédommager le préjudice subi. Ce dernier pourra ensuite se retourner contre le voleur (salarié ou non de l’entreprise).

 

(1) Art. 1915 Code civil : « Le dépôt, en général, est un acte par lequel on reçoit la chose d'autrui, à la charge de la garder et de la restituer en nature. » et Cass. Civ. 10.05.72, n°71-40.247 : pour qu’il y ait un contrat de dépôt, il faut le consentement réciproque des 2 parties, ce qui signifie que l’employeur ne pourra pas être considéré comme dépositaire s’il s’était expressément opposé au dépôt de certains objets dans l’entreprise suppose (art.1921 du Code civil).               (2) Art. 1927 du Code civil : « Le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent ».
(3) Cass. Soc., 04.02.98, n°95-44086.
(4) Art.1929 du Code civil : « Le dépositaire n'est tenu, en aucun cas, des accidents de force majeure, à moins qu'il n'ait été mis en demeure de restituer la chose déposée ».
(5) Conseil d’État, 04.05. 88, n°68.032. Une telle clause peut toutefois être incluse dans les dispositions déterminant le statut du personnel. Dans ce cas, c’est au salarié de prouver la faute de l’employeur (mauvaise organisation, défaut de surveillance du gardien, défaut de serrures ou cadenas…).