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Procédure conventionnelle: quel impact sur le licenciement?

Publié le 01/04/2015

Le non-respect d’une procédure conventionnelle peut priver un licenciement de cause réelle et sérieuse, lorsque les juges estiment que ces dispositions constituent une garantie de fond. Selon deux arrêts récents, l’obligation d’information des délégués du personnel préalable à un licenciement disciplinaire, instituée conventionnellement, constitue une garantie de fond. Cass. Soc. 17.03.15, n°13-24.252 et n°13-23.983.

  • Les faits

La convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, à laquelle sont soumises les deux sociétés en cause, prévoit une information des délégués du personnel préalable au licenciement disciplinaire. Or, dans ces deux affaires, les employeurs ont licencié leurs salariés respectifs pour faute grave sans juger bon d’en informer en amont les délégués du personnel.

Estimant la procédure de licenciement non respectée, les salariés ont donc saisi le conseil de prud’hommes pour contester leur licenciement.

Alors qu’une cour d’appel a fait droit à la demande du salarié, l’autre a rejeté la demande au motif qu’une simple information  préalable des délégués du personnel ne constituait pas une garantie de fond susceptible d’affecter la validité même du licenciement. Tout au plus, le non-respect de cette formalité entraînait- t-il  le versement de dommages-intérêts. La Cour de cassation a donc été saisie.

  • Garantie de fond ou garantie de forme ?

La question posée à la chambre sociale est la suivante : l’information préalable des délégués du personnel au licenciement disciplinaire, instituée par la convention collective, constitue-t-elle une garantie de fond dont la violation affecte la validité même du licenciement ?

Oui, répond la Cour de cassation : « l’information des délégués du personnel préalable au licenciement disciplinaire (...) constituait une garantie de fond dont le non-respect privait le licenciement de cause réelle et sérieuse ».

Si l’employeur dispose d’un pouvoir disciplinaire au sein de son entreprise, il est toutefois tenu de respecter la procédure disciplinaire instaurée par le Code du travail parfois complétée par des dispositions conventionnelles plus favorables aux salariés et renforçant ainsi leurs garanties.  Il est aujourd’hui admis que lorsqu’une procédure conventionnelle de licenciement constitue pour le salarié une garantie de fond, le licenciement intervenu au mépris de cette procédure est dénué de cause réelle et sérieuse.

Il convient donc de distinguer les procédures conventionnelles qui prévoient de simples garanties de forme (1), dont la violation entraîne le versement de dommages-intérêts, de celles qui apportent de véritables garanties de fond (2) et dont le non-respect prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.  Cette distinction, qui n'est pas toujours aisée, est indispensable compte tenu des conséquences qu’entraînera l’une ou l’autre des qualifications.

Selon la Cour de cassation, cette obligation vient s’ajouter aux autres dispositions conventionnelles relatives au licenciement disciplinaire. Les employeurs se devaient de la respecter au même titre que les autres. S’agissant d’une garantie de fond, les licenciements sont par conséquent sans cause réelle et sérieuse.

Conformes à la jurisprudence constante, ces arrêts illustrent  la distinction entre garanties de fond et simples irrégularités  de forme. On peut toutefois se réjouir de l’interprétation relativement large que la Cour de cassation fait de la notion de garanties de fond. En effet, en l’espèce, il ne s’agit que d’une simple information  préalable des délégués du personnel et non d’un véritable avis consultatif.



(1) Par exemple: le non-respect d’un délai conventionnel de saisine d’un organe consultatif.

(2) Par exemple : la consultation d’un organisme chargé de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l’employeur ou encore l’exigence de deux sanctions avant tout licenciement.